Tarentules envoyées par la poste: le Nicaragua exporte ses animaux exotiques

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Une employée prépare le conditionnement d'une tarantule (Aphonopelma seemanni) avant son envoi vers les Etats-Unis, dans le centre d'élevage d'animaux exotiques, près de Managua, le 27 juin 2022 © AFP/Archives OSWALDO RIVAS

Ticuantepe (Nicaragua) (AFP) – Yesenia Talavera dépose délicatement une minuscule grenouille dans un récipient de plastique percé de petits trous. C’est ainsi que le batracien va voyager depuis le Nicaragua jusqu’aux États-Unis où il deviendra un animal de compagnie. Des tarentules et des boas seront aussi du voyage.

La petite grenouille aux yeux rouges va être envoyée à son destinataire par Exotic Fauna, un élevage spécialisé d’animaux exotiques, situé à Ticuantepe, au sud-est de Managua.

Ces espèces de la forêt tropicale d’Amérique centrale sont très prisées « par les personnes qui veulent sortir de la routine d’avoir des chiens et des chats », raconte à l’AFP Yesenia Talavera, qui gère l’entreprise avec son mari Eduardo Lacayo.

Le couple élève depuis quinze ans 18 espèces qui sont commercialisées comme animaux de compagnie aux Etats-Unis, au Canana et en Asie.

Les employés préparent la dernière commande reçue d’une entreprise basée à Miami: 1.200 grenouilles — aux yeux rouges (Agalychnis callidryas) et dites de verre (Centrolenidae) — 140 basiliscus, 150 lézards, 400 tarantules noires, 400 araignées zébrées et 350 boas constrictors.

La plupart sont placés sur une éponge humide dans des récipients conditionnés, d’autres, comme les boas, dans des sacs en toile qui sont ensuite rangés dans des caisses. Aucun animal n’est mis sous sédatif pour le voyage.

« Ces petits animaux peuvent supporter des voyages de 24 heures et jusqu’à trois jours » sans manger, explique Yesenia Talavera, tandis qu’un inspecteur du ministère de l’Environnement supervise le processus et valide le départ des animaux.

Un camion transportera la cargaison jusqu’à l’aéroport international de Managua, où, après avoir passé la douane, elle partira le lendemain sur un vol commercial à destination de Miami.

Exotic Fauna assure respecter les normes de la Convention sur le commerce international des espèces menacées de la faune et flore sauvage (CITES), qui garantit que ce commerce ne met pas en péril la survie des espèces.

Avant de partir pour être adoptées à l’étranger, les grenouilles ont été nourries avec des grillons. Dans leur nouveau foyer, elles pourront vivre « jusqu’à deux ans » si elles sont bien soignées, explique Harlintong Bonilla, un employé de 27 ans. Les tarentules, elles, « vivent de cinq à dix ans et se nourrissent d’insectes », précise-t-il.

Digestion

Pendant la pandémie de Covid-19, les amphibiens se sont bien vendus parce qu’ils « divertissaient » les personnes confinées, relève Eduardo Lacayo.

Les araignées ne sont pas loin derrière. « Mes clients américains aiment les tarentules, ils les manipulent comme si elles étaient des animaux de compagnie », ajoute-t-il, devant une araignée zèbre (Salticus scenicus) à l’abdomen rayé de noir et blanc.

« Elles sont vénéneuses, mais elles ont le venin d’une guêpe. Si (la personne) n’est pas allergique, il n’y a pas de problème », assure-t-il.

Le ministère de l’Environnement du Nicaragua promeut l’élevage et la reproduction d’espèces exotiques par le biais de formations et de conférences, afin d’encourager les habitants à se lancer dans cette activité.

Selon le ministère de la Famille, quelque 39.496 foyers travaillent dans le secteur.

Les exportations sont cependant la spécialité d’une poignée d’élevages privés. En 2019, selon des données officielles, ces exportations ont représenté 300.000 dollars. Selon le journal El 19 Digital, proche du pouvoir, elles sont désormais estimées à 700.000 dollars.

Pour le président de la Fondation du Zoo national, Eduardo Sacasa, si les animaux sont « reproduits dans leur habitat « naturel » ce n’est pas un problème », car cela n’a pas de conséquence sur la conservation de la faune.

L’association internationale de défense des animaux, Peta, juge toutefois que ces animaux « ne tirent aucun bénéfice » de ce commerce et « n’aiment pas vivre en captivité dans une maison ».

Du côté des clients, les Asiatiques adorent les tortues, tandis que le marché des boas doit faire face à la concurrence des reptiles venus de Colombie, plus colorés.

Harlintong Bonilla nettoie et nourrit les boas avec des souris « vermifugées et vitaminées », elles-mêmes alimentées avec des fruits de la propriété.

Mais les boas constrictors qui sont exportés n’ont pas droit au festin dont se régalent les autres animaux avant d’embarquer, expliquent les employés. Car s’ils mangent avant le départ, ils risquent de ne pas digérer correctement et de vomir pendant le voyage.

© AFP

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