Brésil : l’ancien porte-avions français Foch va finir au fond de l’océan

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Le porte-avions français Foch accompagné du pétrolier ravitailleur Meuse, au large des côtes Adriatiques en février 1994 © AFP/Archives -

Rio de Janeiro (AFP) – Ancien fleuron de la marine française, le porte-avions Foch, passé sous pavillon brésilien en 2000, va être coulé dans l’Atlantique en raison de la détérioration de sa coque, ont annoncé les autorités brésiliennes, qualifié de « crime environnemental » par des ONG.

Qualifiée de « colis toxique de 30.000 tonnes » par l’association Robin des Bois, la vieille coque de 266 mètres de longueur est remplie d’amiante, de peintures et autres déchets toxiques, selon plusieurs organisations de défense de l’environnement.

Mais la marine brésilienne a estimé qu’il n’y avait pas d’autre choix vu son état très dégradé et qu' »un naufrage spontané » de la coque était inéluctable à terme.

« Face aux risques qu’implique le remorquage et en raison de la détérioration de la coque (…), la seule solution est d’abandonner la coque en la coulant de façon contrôlée », a expliqué la marine tard mercredi dans un communiqué conjoint avec le ministère brésilien de la Défense.

Une zone située à quelque 350 km au large des côtes brésiliennes, avec 5.000 mètres de profondeur, a été considérée comme étant « la plus sûre » pour ce sabordage, selon le communiqué.

Il y a deux semaines, la marine avait annoncé avoir pris en remorque l’ancien porte-avions dans l’Atlantique. Il était jusque-là tracté par un remorqueur néerlandais pour le compte du chantier turc Sok Denizcilik.

La marine avait précisé qu’au vu de son état de dégradation et « du risque élevé » qu’il représentait pour l’environnement, elle n’autoriserait pas son retour dans un port ou dans les eaux territoriales brésiliennes.

Plusieurs ONG avaient alors fait part de leur crainte de voir le Brésil commettre un « crime environnemental ».

« La marine brésilienne devrait être condamnée pour négligence. S’ils coulent cette embarcation hautement toxique au milieu de l’Atlantique, ils vont violer sans aucune bonne raison trois traités environnementaux internationaux », a accusé Jim Puckett, directeur du Basel Action Network (BAN).

 Opérations au Kosovo

Le parquet fédéral avait demandé à la justice d’interdire à la marine de le couler mais cette requête a été rejetée mercredi par un tribunal de l’Etat du Pernambouc (nord-est).

La saga de l’ancien fleuron de la marine, qui a notamment participé aux opérations aériennes de l’OTAN contre la Yougoslavie au printemps 1999, lors de la crise du Kosovo, rappelle celle de son navire-jumeau, le Clemenceau.

Ce dernier a été déconstruit en 2010 au Royaume-Uni après avoir été interdit en Inde à la suite d’une vive polémique autour de la présence d’amiante à son bord.

Construit à la fin des années 1950 dans le chantier naval de Saint-Nazaire, dans l’ouest de la France, le Foch a été pendant 37 ans au service de la marine française.

Le navire, capable de catapulter des avions de 12 à 15 tonnes à une vitesse de 150 noeuds au décollage, avait été acheté en 2000 par le Brésil, qui l’a rebaptisé Sao Paulo.

Mais en raison de sa vétusté et d’une série de problèmes liés notamment à un incendie en 2005, et alors que sa modernisation aurait coûté trop cher, Brasilia a décidé de s’en défaire.

Pas le bienvenu

Le chantier Sok Denizcilik l’a acheté pour sa ferraille en avril 2021 mais menaçait de l’abandonner faute de trouver un port pour l’accueillir.

En juin 2022, il obtient l’autorisation des autorités brésiliennes de le convoyer jusqu’en Turquie en vue de son démantèlement.

Mais alors qu’il se trouve fin août au niveau du détroit de Gibraltar, les autorités environnementales turques font savoir qu’il n’est plus le bienvenu.

Le Brésil lui fait faire demi-tour mais sans l’autoriser à accoster malgré le constat d’une « aggravation des dommages » au niveau de la coque.

Le 19 janvier, le remorqueur néerlandais ALP Guard opérant pour le compte du chantier commence à s’éloigner des côtes brésiliennes, après avoir passé plusieurs mois au large du Pernambouc.

Mais une décision de justice lui interdisait de naviguer dans les eaux internationales sans autorisation préalable des autorités brésiliennes.

C’est la raison pour laquelle l’agence publique environnementale brésilienne Ibama, responsable au Brésil de l’application de la Convention de Bâle sur les mouvements transfrontaliers de déchets dangereux, a fini par demander une intervention de la marine brésilienne.

© AFP

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