Face à l’explosion démographique, renoncer aux enfants pour sauver le climat

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Pour lutter contre le changement climatique, des militants écologistes choisissent de ne pas avoir d'enfants © AFP/Archives Nikolay DOYCHINOV

Paris (AFP) – « A l’heure actuelle, il est complètement fou de faire des enfants! ». Convaincus que la lutte contre le changement climatique suppose de réduire la population mondiale, des militants écologistes s’appliquent ce principe à eux-mêmes, en renonçant à devenir parents.

Alors que le cap des 8 milliards d’êtres humains va bientôt être franchi, « nous sommes déjà trop nombreux par rapport à ce que la planète peut encaisser », estime Alice Rallier, 44 ans, membre de « Démographie responsable ».

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Cette petite association française « écologique et décroissante » milite pour « la stabilisation puis la lente diminution de la population humaine ».

« Je ne veux pas ressentir la culpabilité d’avoir mis au monde un enfant dans cette galère », affirme à l’AFP Mme Rallier, qui a été en couple avec deux hommes « qui ne voulaient pas d’enfant non plus », et qui a choisi de subir une stérilisation chirurgicale définitive.

« Tout enfant qui naît aujourd’hui fait partie du problème » en raison de la pression exercée par la croissance démographique sur les ressources naturelles, selon cette militante qui se dit consciente de se heurter à un « tabou » et au « mythe populationniste qui dit que, plus on est nombreux, mieux c’est ».

Pour ces militants, il ne s’agit pas de contraindre mais de proposer une « incitation volontaire », par exemple en plafonnant les allocations familiales à partir du deuxième enfant, argumente Denis Garnier, président de « Démographie responsable ».

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Selon une enquête publiée en 2021 par The Lancet, menée auprès de 10.000 personnes dans dix pays de tous les continents, 39% des jeunes de 16 à 25 ans « hésitent à faire des enfants » car ils sont inquiets face au changement climatique.

L’idée a été relayée au Royaume-Uni en 2018 par les tenants d’une « grève des naissances » (« birthstrike »), et au Canada par des étudiants qui s’engageaient à ne pas avoir d’enfants tant que le gouvernement n’agirait pas davantage contre le changement climatique. En Allemagne, une autrice anti-nataliste, Verena Brunschweiger, a fait polémique en décrivant la parentalité comme une démarche « égoïste ».

Inertie démographique

« Beaucoup de gens s’interrogent » mais le phénomène reste difficile à quantifier, nuance le consultant français Emmanuel Pont, auteur du récent livre « Faut-il arrêter de faire des enfants pour sauver la planète? » (éditions Payot).

D’autant que l’environnement n’est pas la seule motivation de ceux qui refusent de devenir parent et que certains finissent par changer d’avis.

A 35 ans, Sébastien Verdier –connu sur les réseaux sociaux sous son pseudonyme militant Sereb– a « mis ses actes en accord avec ses idées », en subissant une stérilisation définitive.

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Il s’agit pour lui à la fois d’éviter à l’enfant à naître « un futur désagréable que je ne souhaite à personne » et « de ne pas rajouter dans le système un consommateur de plus ».

« Sereb » convient toutefois que son engagement est plus « symbolique » que réellement efficace pour lutter contre le réchauffement de la planète, en raison de « l’énorme inertie » des évolutions démographiques qui ne font sentir leurs effets qu’après plusieurs décennies.

selon une étude publiée en 2014 par deux chercheurs australiens, « même avec des politiques de l’enfant unique imposées partout dans le monde et des événements entraînant une mortalité catastrophique, il y aurait toujours probablement entre 5 et 10 milliards d’êtres humains en 2100″.

En outre, au-delà de cette question de l' »inertie démographique », le lien entre démographie et protection du climat ne fait pas consensus.

Une étude publiée en 2017 par deux spécialistes nord-américains du changement climatique avait conclu qu’avoir « un enfant de moins » était beaucoup plus efficace en terme de bilan carbone que de renoncer à la voiture, aux voyages en avion ou à la consommation de viande.

Mais d’autres scientifiques ont contesté ces résultats, au motif que les auteurs avaient considéré que les générations futures auraient forcément un niveau de consommation aussi néfaste pour l’environnement que leurs aînés.

Or « nos enfants ne sont pas condamnés à rouler en SUV et à s’envoler tous les weekends pour Ibiza », ironise Emmanuel Pont. Pour autant, limiter la fécondité pour lutter contre le réchauffement n’a « rien d’absurde », selon lui… au même titre que faire isoler son logement ou limiter ses voyages en avion.

© AFP

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3 commentaires

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    • normal

    bien evidemment que l »humain est la source n° 1 de la pollution. Il faut que les naissances se réduisent drastiquement couplé à un arrêt des allocations pour chaque naissance.

    • Krafft

    Cette stratégie decliniste est dangereuse pour l’avenir de notre planete car les groupuscules écologistes occidentaux n’ont aucune influence sur la politique de natalité des pays africains tous en tête du classement de fécondité pour exemple le Niger affiche 7.2 naissances par an en 2016 , la France premier pays d’Europe 2 naissances au 117 rang mondial.
    La natalité représente souvent une arme pour certains pays comme Israel et la palestine.
    La pauvreté s’exporte dans les pays occidentaux par le canal des passeurs de migrants et ces arrivées compensent la baisse de la fécondité occidentale.

    • Peter

    Je suis complètement d’accord. Sans meme penser aux horreurs que les future générations vont falloir sans doute rencontrer, chaque etre humain est un consommateur, spécialement dans les pays riches, donc meilleur solutions c’est réduire les naissances, dans les pays pauvres parce qu’il y en à trop et dans les pays riches parce que chaque etre humain consomme.