Étude sur la toxicité du glyphosate : le consortium sélectionné par l’Anses se retire, après des soupçons de conflit d’intérêt

pesticides

Épandage de pesticides, Jeju, Corée du Sud © Yann Arthus Bertrand

L’Anses (Agence de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a annoncé dans un communiqué jeudi 23 juillet le retrait d’un consortium de sept laboratoires sélectionné pour conduire une étude sur le caractère cancérogène du glyphosate, en raison de soupçons de conflit d’intérêt.

Le consortium de sept laboratoires avait été sélectionné après un appel d’offre de l’Anses pour mener une étude sur le potentiel cancérogène du glyphosate, fin avril. Ce consortium était coordonné par l’Institut Pasteur de Lille (IPL), ainsi que le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC).

Dans un communiqué, l’Anses a annoncé le retrait du consortium, du fait du « climat de suspicion sur le résultat des études peu propice à la sérénité des débats scientifiques ». Dans une enquête publiée mardi 16 juin, Le Monde s’interrogeait sur les conditions d’attribution de l’appel d’offre et sur l’indépendance dont avait fait preuve l’Anses dans la procédure.

En effet, l’IPL, coordonnant le consortium, est dirigé par Fabrice Nesslany, à la tête du groupe d’expertise collective d’urgence (GECU) de l’Anses avait participé à la rédaction du cahier des charges de l’étude, selon un collectif lanceur d’alerte. Ce collectif avait aussi révélé que d’autres laboratoires sélectionnés présentaient aussi des chercheurs qui avaient pris part à l’élaboration de l’appel d’offre.

L’Anses tient tout de même à défendre son choix : « L’examen des candidatures reçues a porté à la fois sur la pertinence des propositions en réponse au cahier des charges et sur l’originalité des solutions proposées », assure-t-elle dans le communiqué. Et elle précise que le projet reste maintenu et sera mené par le CIRC.

François Veillerette, directeur de l’association de Générations Futures se félicite de cette décision : « nous avions bien repéré l’entorse à la déontologie de l’Anses. Si l’Anses n’avait pas réagi, nous aurions porté l’affaire. » Il estime que : « sur un dossier aussi polémique que le glyphosate, il était impossible de commencer par une entorse aux règles », tout en notant les lacunes françaises dans le domaine de la toxicologie qui expliquent en partie la situation. « Il est vrai qu’en France la toxicologie est sinistrée, nous le disons depuis des années. Il va falloir former des experts. »

Et d’ajouter que dans l’évaluation des molécules potentiellement toxiques, il faut recourir aux études évaluées par des pairs et non pas se contenter uniquement de celles fournies par les agences ou les industriels : « avant de payer de nouvelles études, il faut d’abord utiliser et évaluer toutes les études préalables publiées. Il faut prendre en compte la littérature scientifique des 10 années précédentes l’évaluation, selon la réglementation. S’appuyer dessus permet de gagner du temps. Or, ces études sont souvent mises de côté par les agences lorsqu’elles rendent leur avis, au motif du non-respect des bonnes pratiques de laboratoire. Ces « bonnes pratiques » sont des procédures d’enregistrement très lourdes qui n’ont cependant pas d’apport au niveau de la qualité scientifique ».

Adèle Tanguy et Julien Leprovost

À lire également :

Glyphosate : soupçons de conflits d’intérêts au sein de l’Anses

Fongicides SDHI : Fabrice Nicolino alerte sur une catastrophe sanitaire « plausible » et épingle la proximité des agences sanitaires avec les industriels

« Le bilan du plan Ecophyto s’avère catastrophique », François Veillerette de Générations Futures

Jean-Marc Bonmatin : « l’immense majorité des pesticides ne servent pas à grand-chose »

6 commentaires

Ecrire un commentaire

    • Claude Courty

    Et bien entendu, qui dit soupçon dit culpabilité assurée. alors que la pureté des intentions écologistes ne fait aucun doute.
    La preuve ? Les résultats des dernières municipales et leurs suites.

    • Michel CERF

    Cancérogène ou pas le glyphosate est un poison mortel , sinon pourquoi sans servir , quand aux dernières élections municipales il me semble qu’un minimum de temps s’impose avant de juger .

    • Jean-Pierre MILLE

    Monsieur CERF, vous dites « le glyphosate est un poison mortel… » sur quoi vous appuyez-vous ? avez vous des études, des résultats de tests scientifiques (reconnus par la profession) ? Avez-vous des résultats d’essais réalisés par des structures indépendantes ? (ni firmes phyto, ni écolo) parce que, dans l’état actuel des choses, avec le retrait du consortium, on n’est pas prêt d’en avoir… D’ailleurs, n’est-ce pas aussi une des raison de ce retrait ?

    • J Guasilas

    “ Cancérigène ou pas, le glyphosate est un poison mortel”

    Bon, eh bien comme ça, la question est résolue.. Pourquoi au monde faire des recherches quand on peut se baser sur des solides préjugés? C’est vraiment une perte de temps et d’argent, surtout si le résultat des recherches se révèle contraire aux préjugés.

    • Michel CERF

    Mr. MILLE , vous défendez sans doute Monsanto et ses produits par intérêt , vous savez très bien que des milliers de procédures ont été intentées , notamment aux Etats Unis contre Monsanto , d’ailleurs l’O M S a classé ce produit comme probablement cancérogène , les malades souvent agriculteurs savent , eux , à quoi s’en tenir . De plus Monsanto commercialise des semences OGM pour tolérer son herbicide , lequel ne détruit pas seulement les herbes dites  » mauvaises  » mais des études scientifiques prouvent les conséquences néfastes de ce produit pour la flore , la faune , en particulier les oiseaux et les abeilles , comme tous les herbicides il détruit la vie et appauvrit les sols . Je ne suis pas un scientifique mais j’ouvre les yeux , observe et constate , je peux me tromper mais au moins , moi , je suis de bonne foi .

    • Michel CERF

    Mon commentaire s’adresse également aux autres intervenants .