L’humanité au défi de nourrir 10 milliards de personnes sans détruire la planète

Vue aérienne de champs cultivés à la lisière de la savane Cerrado, le 14 juin 2019 à Formosa do Rio Preto, au Brésil © AFP/Archives NELSON ALMEIDA

Vue aérienne de champs cultivés à la lisière de la savane Cerrado, le 14 juin 2019 à Formosa do Rio Preto, au Brésil © AFP/Archives NELSON ALMEIDA

Paris (AFP) – Comment nourrir une population toujours plus importante sans détruire la nature, dont nous dépendons ? Cette question cruciale pour la survie de l’humanité est au coeur de discussions qui démarrent vendredi à Genève.

Le rapport spécial du groupe d’experts de l’ONU sur le climat (Giec) consacré au « changement climatique, la désertification, la dégradation des sols, la gestion durable des terres, la sécurité alimentaire et les flux de gaz à effet de serre dans les écosystèmes terrestres », qui doit être rendu public la semaine prochaine à l’issue de ces rencontres à huis clos, sera l’analyse scientifique la plus complète à ce jour sur le sujet.

Ce texte de plus de 1 000 pages devrait mettre en avant la façon dont l’alimentation industrielle, du producteur au consommateur, l’exploitation généralisée des ressources, voire même certains efforts pour contrer les effets du réchauffement climatique compromettent notre capacité à nous nourrir à l’avenir.

Il devrait aussi dresser le tableau d’une société où deux milliards d’adultes sont en surpoids ou obèses et où des quantités importantes de nourriture sont jetées, quand la faim affecte des millions de personnes à travers le monde.

Les conclusions de ce rapport sont condensées dans un résumé que les délégations d’environ 195 états réunies à Genève examineront de près à partir de vendredi, avant d’en approuver une version définitive.

Ce sera l’occasion de mettre en lumière l’importance d’un usage optimal des terres, un aspect longtemps négligé, selon les experts. « Quand on regarde à la fois les conséquences du changement climatique et les contributions à ce changement, le secteur des terres est incroyablement important », souligne Lynn Scarlett, de l’ONG The Nature Conservancy, auprès de l’AFP.

« Les impacts sont vastes et ne concernent pas que l’avenir : ils sévissent maintenant et sont critiques pour le bien-être des gens et de la nature », avertit-elle.

L’agriculture et la déforestation représentent ainsi environ un quart des émissions des gaz à effet de serre.

« Insoutenable »

L’agriculture utilise un tiers de toutes les terres émergées et les trois-quart de l’eau douce sur la planète.

Alors que la population devrait frôler les dix milliards d’individus au milieu du siècle, contre 2,6 milliards en 1950, la crainte existe que le système atteigne ses limites.

La viande et le gaspillage alimentaire constituent deux points noirs. Environ 30% de la nourriture produite finirait à la poubelle.

« Bien que les terres produisent bien plus de nourriture qu’il n’en faut pour nourrir tout le monde, il existe toujours 820 millions de personnes qui vont se coucher chaque soir en ayant faim », rappelle Stephan Singer de Climate action network.

« Ce rapport arrive à un moment critique car l’agriculture est à la fois une victime et un moteur du changement climatique », ajoute Teresa Anderson, de l’ONG ActionAid.

La culture extensive de céréales comme le soja, utilisées pour nourrir le bétail mais aussi pour les bio-carburants, contribuent à la destruction des forêts qui stockent le carbone.

« Nous devons tourner le dos à une agriculture industrielle nocive basée sur des produits chimiques, la déforestation et les émissions » de gaz à effet de serre, insiste Teresa Anderson.

Le rapport abordera aussi les questions de désertification et la dégradation des habitats par l’agriculture, avec une surface de forêt tropicale équivalente au Sri Lanka perdue chaque année.

Un autre point sera sur les arbitrages à faire entre l’usage des terres pour l’alimentation, le stockage de carbone via les forêts et la production d’énergie à partir de matière biologique.

Il n’oubliera pas le sort des populations indigènes et des femmes, particulièrement exposées.

En octobre 2018, un autre rapport spécial du Giec détaillait les impacts attendus d’un réchauffement climatique limité à 1,5°C, en ligne avec les objectifs de l’Accord de Paris, et sur les moyens de rester sous ce seuil très ambitieux.

Depuis, des mouvements citoyens se sont formés et des centaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue pour demander à leurs gouvernements d’agir plus vite contre le changement climatique.

© AFP

7 commentaires

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  • Je ne devrais peut-être pas dévoiler cette figure avant ma prochzine réunion avec l’APPEM aux sources de la Loire mais vu l’enjeu je pense qu’il ne m’en voudrons pas aussi je le fais malgré tout. voir
    https://www.dropbox.com/s/p4iwzynz38le4zc/APPEM-2019%2011.pdf?dl=0

    Même après la modification de nos chaînes énergétiques actuelles qui sont maintenant, il faut se rendre à l’évidence d’un autre âge, nous continuerons à dépenser plus d’énergie pour alimenter notre voiture et nous chauffer que pour nous nourrir. Et ceci avec un élevage du bétail et une agriculture locales.

    Tout compte fait la voix est tracée: la France vient de montrer l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire avec le CETA

    • Meryl Pinque

    Ne faisons plus d’enfants et adoptons une nourriture 100 % végétale !
    C’est si simple…

    • Étonnant constat : Le pastoralisme est considéré comme un élément majeur de l’agriculture verte .
      En effet, le fait d’utiliser des terres incultes sans les travailler ni utiliser d’intrants en faisant pâturer de la flore non comestible pour les humains permettant de produire des aliments de qualités dans le respect de la nature et des animaux tout en privilégiant la durabilité la traçabilité et la proximité n’enchante pas les écologistes adepte de la deep écologie. Sont ils manipulés par les financiers qui rêvent de s’approprier les terres des derniers véritables paysans?
      C’est si simple de se donner bonne conscience sans lever le petit doigt.
      http://leloupdanslehautdiois.blogspot.com/2018/12/les-evangelistes-sauveur-de-la-planete.html

    • sophie

    Les gens très responsables ne feront plus d’ enfants, les gens responsables en auront 1 ou 2 ( dont adoptés ) et il y aura toujours bien assez d’ humains pour continuer à procréer sur la Planète exténuée.

    Sobriété heureuse en ligne de mire pour une majorité de citoyens lucides ; les autres camperont dans la beaufitude du « toujours plus » et l’ obsession du pouvoir d’ achat , tant pis pour eux;

    Dans tout ça les seuls réellement victimes et à plaindre restent la Nature et les Animaux .

    • Michel CERF

    Il est évident que la Planète est surpeuplée , ne plus faire d’enfants est facile à dire mais complètement utopique , cela ne résout rien , ne sert à rien , soyons réalistes .

    • Claude Renaud

    Avant d’aborder la délicate question de l’enfant à naître, il faut se placer, non pas du point de vue
    des parents, qui tous ont envie d’avoir une progéniture, mais du point de vue de l’enfant. Quel futur peut-on lui assurer ? Dans 30 ans, dans 50 ans. Nous sommes déjà incapables aujourd’hui, d’assurer
    un avenir à nos adolescents. Quelle visibilité a-t-on des décennies à venir. C’est le brouillard !
    Nous sommes de plus en plus sur cette terre, avec de moins en moins de ressources et un Climat complètement détraqué. Je vous rappelle, que depuis le 29 juillet, l’Humanité vit à crédit.
    Alors, faire un enfant ou pas ? Mais quelle responsabilité !!!

    • Albert Masson

    On ne résoudra rien avec des solutions extrêmes qui ne seront pas acceptées par les populations
    Arrêter brutalement tout produit chimique en agriculture provoquerait un choc brutal et une baisse dramatique de production. Par contre la promotion de méthodes agronomiques intelligentes: richesse en humus , engrais verts, rotations des cultures, sélection variétale, suppression des vastes étendues en monoculture, plantation d’arbres et de haies, réduction du travail du sol etc….pourraient accompagner une diminution progressive des intrants. L’interdiction du glyphosate s’il n’est pas remplacé par quelque chose d’équivalent, aura plus d’effets négatifs que positifs car cela oblige à davantage de façons culturales pour implanter les cultures, d’où consommation d’énergie, et fragilisation de la structure des sols. Pas de solution miracle mais des efforts coordonnés d’amélioration, on ne peut pas se permettre des chutes de rendement généralisées en improvisant brutalement des méthodes naturelles.