Illange (France) (AFP) – « Revenir au charbon, à notre époque ! » : à Illange (Moselle), l’implantation par l’allemand Knauf d’une usine de laine de roche, fonctionnant au coke, inquiète associations et riverains, alors que ses défenseurs assurent que tout est mis en œuvre pour limiter la pollution.
La production, estimée à 100 000 tonnes de laine de roche annuellement, doit démarrer dès septembre.
Sur le site de quinze hectares où se construit l’usine, les travaux avancent vite : sur le sol, de longs morceaux de la cheminée, rouge et blanche, qui culminera à 60 mètres de hauteur. Autour, un ballet d’hommes et de véhicules.
Au printemps 2018, le groupe Knauf Insulation avait annoncé la construction de cette nouvelle unité sur la Mégazone d’Illange-Bertrange, friche industrielle appartenant au département de la Moselle et proche de l’A31.
L’investissement s’élève à 110 millions d’euros, avec à la clé la création de 123 emplois et 20 millions d’euros de retombées économiques avec les emplois indirects et induits.
La matière isolante, utilisée dans la construction de bâtiments, sera destinée à la France, l’Allemagne et au Benelux.
« Revenir au charbon, à notre époque ! », s’étrangle Chantal Ehly, un pin’s aux couleurs du collectif « Stop Knauf Illange » épinglé sur son chemisier. « Et dire qu’avant, c’était un poumon vert avec des terres agricoles ! ».
Pour le collectif, l’usine émettra 80 000 tonnes de CO2 par an, sans compter la pollution des camions acheminant la matière première, alors que dans un rayon de 100 à 350 mètres se situent terrain de foot, école primaire, accueil périscolaire et habitations.
« Les enfants vont être exposés pendant des heures » à ces pollutions, se désole Danielle Sausalone, secrétaire du collectif.
« Les vrais problèmes de pollution ne seront pas décelés immédiatement, mais bien plus tard. Pour l’amiante, on a mis 40 ans à se rendre compte des dégâts », soupire Guy Vignard, président du collectif, qui compte 450 membres.
Régis Paul, exploitant agricole bio dans le secteur, redoute « qu’à cause de l’air pollué demain avec cette usine, on ne veuille plus de mes produits ».
« On a l’impression que d’un côté il y a les citoyens qui doivent faire des efforts et de l’autre, des gros pollueurs à qui tout est permis », peste l’agriculteur de 33 ans.
Le collectif a déposé devant le tribunal administratif de Strasbourg un recours et un référé suspension, qui sera examiné le 18 juin.
Aubaine économique
« Nous restons sereins, parce que nous avons appliqué les procédures les plus pertinentes et obtenu les autorisations », affirme Mark Leverton, directeur de la région Europe de l’ouest à Knauf.
« Réglementairement, nous sommes obligés, en Europe et particulièrement en France, d’utiliser les meilleures techniques disponibles pour assurer un niveau de substances polluantes le plus bas possible », abonde Philippe Coune, responsable environnement et santé du groupe.
Il assure que « toutes les études faites prouvent qu’il n’y a aucun impact sanitaire sur les populations, même les plus fragiles ».
L’utilisation du coke s’explique par l’absence « de technologie disponible pour utiliser d’autres sources d’énergie », explique M. Leverton.
« La laine de roche que nous produirons économisera deux cents fois la quantité de CO2 utilisée pour sa fabrication », souligne le directeur Europe de l’ouest, précisant que Knauf cherche à avoir « un impact positif sur l’environnement ».
Avant de céder le terrain au géant de l’isolation, le département a visité avec des élus concernés et deux association de défense de l’environnement deux usines du groupe, à St. Egidien (Allemagne) et Lannemezan (Hautes-Pyrénées).
« Une unanimité s’est dégagée, parce que nous avons rencontré un groupe très attentif aux questions environnementales, qui s’est engagé à être en-dessous des normes imposées en matière d’émissions de CO2 », souligne Patrick Weiten, président du conseil départemental.
Preuve de sa bonne foi, souligne-t-il, Knauf a accepté que des capteurs soient installés en périphérie du site pour mesurer l’impact de sa production sur l’environnement avec des relevés tous les trois mois et des contrôles inopinés.
« Toute activité humaine a un impact sur l’environnement, c’est inévitable », reconnaît M. Weiten.
L’arrivée du géant de l’isolation est surtout, selon lui, une aubaine pour la vitalité économique du territoire, marqué par la désindustrialisation, et peut attirer d’autres investisseurs.
© AFP
3 commentaires
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Grossmann
Personne ne doute que le responsable de cette usine de production de laine de roche cherche à faire en sorte que son usine est un impact positif sur l’environnement.
le problème est fait en fait de savoir si cela est le cas.
d’après les chiffres goodplanet la masse de CO2 générée annuellement par cette usine (80t) est sensiblement égale à la masse de laine de roche produite (100t) dans le même laps de temps
cette meme masse de laine de roche de 100 tonnes correspond sensiblement vu sa densité très faible 25 kg/m3 à un volume de 4000 m3
ce même volume de 4000 m3 à une surface de 40.000 m2 en 10 cm d’épaisseur
vu le coefficient de déperdition de la laine de roche égal à 0,4 watt/m2 et °C en 10 cm d’épaisseur cette surface de 40.000 m2 entraîne pour un deltaT de 10°C une période de chauffe de 5000 heures une économie d’énergie à l’année voisine de
40 000 x 10 x 0,004 x 5000 =
8 millions de kWh. voir
http://www.infoenergie.eu/riv+ener/LCU_fichiers/LT-deperditions-parois.pdf
une quantité d’énergie correspondant à une masse de CO2 générée variant notablement selon la chaîne énergétique utilisé pour la produire. voir
http://www.infoenergie.eu/riv+ener/LCU_fichiers/RSE-pac-et-environnement.pdf
Pour conclure je dirais que ce n’est pas à moi de tout faire à l’oeil en exprimant le fait que la justice a besoin de bons techniciens indépendants pour faire la part des choses et vérifier si la laine de roche produite par cette usine économise véritablement deux cents fois la quantité de CO2 utilisée pour sa fabrication.
Grossmann
je regrette que goodplanet ait supprimer mon commentaire vu que je faisais un pas vers l’isolation alors que visiblement c’est vers la génération thermique qu’il faut progresser pour réduire les gaz à effet de serre
GoodPlanet
Bonjour Grossmann
il s’agit d’une simple erreur de notre système, votre commentaire est à nouveau visible.
Merci encore pour votre commentaire très détaillé qui nous l’espérons fera avancer les choses dans le bon sens.