Nathalie Machon, spécialiste de l’écologie urbaine : « vivre avec de la végétation un peu partout »

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Un pissenlit qui pousse entre les pavés, le 5 juillet 2015 à Paris © AFP/Archives JOEL SAGET

Paris (AFP) – Les mauvaises herbes, c’est pas sale: Nathalie Machon, spécialiste de l’écologie urbaine, plaide pour une large biodiversité dans les villes en amont de la première « Tribune » du Muséum samedi consacrée à la nature en ville.

« Il faut que les mentalités changent », explique à l’AFP Nathalie Machon, professeure d’Écologie au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) à Paris.

« Une grande partie de nos concitoyens n’a pas conscience que nous avons vraiment besoin de la biodiversité pour vivre durablement », ajoute la chercheuse qui interviendra samedi à l’occasion de la rencontre public/chercheurs « La nature, l’avenir des villes », un nouvel évènement, ouvert à tous, gratuit et sans réservation, organisé Grand Amphithéâtre du Muséum au Jardin des plantes.

« Il suffit d’aller dans les jardineries le dimanche pour voir que les gens sont prêts à acheter des herbicides pour éliminer pâquerettes et pissenlits de leur pelouse », s’insurge Mme Machon. « Mais ces plantes sont nécessaires pour avoir des insectes pollinisateurs, des oiseaux, tout un écosystème qui rend des services aux citadins ».

Un héritage des beaux jardins à la Française où toute mauvaise herbe qui dépasse fait sale. « Il faut que l’esthétique change, la biodiversité, le fonctionnement globale nécessite des espèces qui sont plus ou moins désirables pour des humains ». « Il faut que nos concitoyens acceptent de vivre avec de la végétation un peu partout ».

Pareil pour les rats et les souris: on fait systématiquement de la dératisation mais les études montrent que ces animaux recyclent une énorme quantités de nos ordures.

Également coordinatrice scientifique de plusieurs projets de science participative comme Vigie-Flore, un programme de suivi des plantes à fleurs ou « Sauvages de ma rue » dédié à la flore sauvage urbaine, la scientifique veut « sensibiliser, apporter de l’information » car elle a peur: « on va vers un point de bascule et après… ça sera dramatique ».

« Les études fleurissent dans tous les sens pour montrer à quel point la qualité de vie et la santé des citadins est liée à la qualité de la biodiversité dans leur quartier », rappelle Nathalie Machon. « L’homme peut trouver dans les végétaux et les animaux des solutions aux problèmes qu’il produit lui même ».

« Quand il y a de fortes canicules, les quartiers les plus végétalisés souffrent moins ». « La végétation aide à dépolluer l’eau, les sols, l’air ».

« Dans les quartiers très végétalisés, les gens souffrent moins d’allergie, les gens font plus de sports ». « On sait aussi que les espaces avec de la végétation sont plus apaisants, que les gens souffrent moins de dépression et d’autres maladies psychologiques ».

Mais comme on ne peut pas « faire une forêt à la place de Paris » car « il faut que la ville soit utilisable par les citadins », la chercheuse et ses collègues sont à la recherche de compromis. « C’est la complexité de l’écologie en ville, faire ce qui est bon pour la biodiversité sans que cela soit au détriment des citadins ».

« Il faut trouver comment réinventer la ville, bricoler sur la ville qui existe déjà a ses limites ». Cet été, les toitures végétalisée de Paris ont beaucoup souffert de la canicule.

Une des pistes serait le biomimétisme: les abeilles construisent des ruches très aérées, s’en inspirer pourrait limiter l’utilisation de la climatisation.

« On attend des politiques qu’ils prennent des mesures importantes mais ils ne les prendront que lorsque les citoyens les y pousseront », juge Nathalie Machon.

© AFP

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