Nucléaire : des députés proposent des mesures pour combler des « failles » de sécurité

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Une commission d'enquête parlementaire préconise 33 mesures pour rendre les centrales nucléaires plus sûres © AFP/Archives PHILIPPE DESMAZES

Paris (AFP) – Une commission d’enquête parlementaire a préconisé jeudi 33 mesures pour rendre les centrales nucléaires plus sûres face aux risques d’accident et de terrorisme, après avoir identifié des « failles ».

Renforcer le rôle de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), contrôler la sous-traitance dans le secteur, envisager d’autres modes de stockage des déchets, mettre plus de gendarmes dans les centrales ou publier un programme prévisionnel des réacteurs à démanteler… Les députés se sont attaqués à de nombreux sujets, parfois techniques.

« Quand on cherche des failles, on en trouve et on en a trouvé un certain nombre, dont certaines sont plus préoccupantes que d’autres », a déclaré la députée LREM Barbara Pompili, rapporteure de ce texte, lors de sa remise au président de l’assemblée François de Rugy.

La commission avait été lancée début février pour faire le point sur les enjeux de sûreté (éviter les accidents) et de sécurité (contre les actes de malveillance), dans un pays qui compte 19 installations nucléaires et l’usine de retraitement de La Hague.

Présidée par Paul Christophe (UDI-Agir), elle avait enchaîné les auditions et les visites de sites pendant cinq mois, jusqu’au Japon.

Ces travaux font suite à la catastrophe de Fukushima, mais aussi à plusieurs intrusions sur des sites d’EDF de militants Greenpeace pour dénoncer le « risque nucléaire ». Encore mardi, un drone de l’organisation a survolé une centrale proche de Lyon.

Ce rraport est publié alors que la France est en pleine réflexion sur son avenir énergétique. Le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot avait promis le 29 juin un « échéancier » précis d’ici à la fin de l’année sur la fermeture de réacteurs nucléaires.

Les députés recommandent, eux, « la connaissance même approximative d’un échéancier de démantèlement », dont le coût et le financement restent problématiques. « On peut imaginer que la première échéance pourrait concerner les réacteurs du Bugey, mis en service en 1979 », avancent-ils.

Ils soulignent aussi que « la prolongation de l’exploitation du parc actuel n’est pas certaine, malgré la volonté affichée d’EDF » de prolonger la vie de ses réacteurs au-delà de 40 ans.

Autre question épineuse abordée : le projet « Cigéo » d’enfouissement en profondeur des déchets nucléaires à Bure (Meuse), dont le rapport souligne les « vulnérabilités certaines ». Les députés préconisent ainsi d’explorer une alternative : l’entreposage de longue durée en « subsurface », c’est-à-dire à faible profondeur.

Le rapport se penche aussi longuement sur la question de la sous-traitance, monnaie courante dans l’industrie nucléaire. Il recommande de « favoriser la réintégration des compétences au sein des entreprises exploitantes afin de contenir le niveau de sous-traitance et, de ce fait, de mieux maîtriser la conduite des sites ».

EDF a réagi en assurant ne pas avoir augmenté depuis 15 ans son recours à la sous-traitance pour la maintenance des équipements. Il a aussi pointé « un certain nombre d’erreurs factuelles » dans le rapport et promis d’apporter des précisions d’ici fin juillet.

Enfin, les députés préconisent la création d’une Délégation parlementaire au nucléaire civil, dont les membres pourraient avoir accès aux informations classifiées nécessaires, à l’image de ce qui se fait déjà dans le domaine du renseignement.

Les membres de la commission d’enquête se plaignent d’ailleurs de s’être heurtés au secret défense invoqué par les pouvoirs publics, comme par EDF, notamment sur la question de la résistance à une attaque des piscines, où sont entreposés les combustibles irradiés.

« On a plutôt le sentiment qu’un gros travail est fait pour essayer de protéger les centrales, mais on ne peut pas le vérifier », a regretté Barbara Pompili.

Signe de tensions au sein de cette commission pluripartisane, la publication du rapport a été votée par 15 voix pour, six contre et deux abstentions. L’examen du rapport fin juin a aussi été marqué par quelques controverses.

« Ce rapport souffre d’un péché originel dans sa construction. Il comporte un postulat de départ selon lequel les opposants au nucléaire, les antinucléaires, ont raison », a ainsi jugé le député (LR) Julien Aubert. « La commission d’enquête n’est pas tombée dans le piège d’un débat pour ou contre le nucléaire », assure de son côté Paul Christophe.

© AFP

2 commentaires

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    • Patrice DESCLAUD

    Le pragmatisme devrait primer. Il y a des urgences qui peuvent se traiter en parallèle même s’il y a des priorités (prétexte à sérialisation des décisions). Oui, la sécurité et sûreté. Mais depuis l’origine, le nucléaire civile reste un prétexte opportun au plutonium du nucléaire militaire.
    Donc, d’abord décider et voter avec un échéancier précis et opérationnel d’arrêter cette filière à risques permanents et croissants (en regard des 19 sites des 58 centrales) et arrêter cet EPR ruineux qui ne marchera jamais et endettera la FRANCE.
    S’activer sur le déploiement des solutions alternatives du renouvelable (R&D mais aussi divers parcs solaires et éolien) créatrices d’emplois et reconversions.
    Faire actuellement du stockage en surface des déchets tant qu’on ne sait pas les traiter.
    Programmer les démantèlement sérieusement car on n’y coupera pas quoiqu’il en soit.
    Mettre un terme à ces gué-guerres de corps d’ingénieurs (mine, ponts, …) sur cette filière sans avenir et que les politiques décident fermement la transition avec de réelles échéances. La décision ne relève plus de la technique !
    C’est assez simple si on s’y attaque sans tergiverser et poursuivre ces déficits.
    Cordialement,

  • —> Fermeture de toute urgence du site de Fessenheim pour en faire un centre expérimental d’essai de démantèlement. … Ceci doit être l’avenir du nucléaire : bien savoir démanteler/démonter ce qui pour l’instant ne l’est pas tu tout..
    sur ce même site, les ha de terres libres pourront accueillir des possibilité de production d’énergie alternative.