Le climat dans la Constitution : oui, disent des ONG, mais pas à n’importe quel prix

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L'hémicycle de l'Assemblée nationale, le 10 octobre 2017 à Paris © AFP/Archives BERTRAND GUAY

Paris (AFP) – Le projet du gouvernement d’inscrire le climat dans la Constitution est-il vraiment utile ? Oui, répondent des ONG, mais à certaines conditions et en l’élargissant à la protection de la faune et de la flore.

Dans le cadre de la réforme des institutions, l’exécutif envisage de compléter l’article 34 de la Constitution, qui définit les champs d’application de la loi, en y ajoutant « l’objectif de lutte contre les changements climatiques ».

Le Conseil économique, social et environnemental (Cese) pourrait aussi devenir une « chambre du futur » qui éclairera le gouvernement sur l’impact des projets de loi.

« On a besoin de mettre le climat dans la Constitution pour (…) avoir des lois qui portent », a approuvé mercredi le député Matthieu Orphelin (LREM).

Pour les ONG, cette intention est louable mais souffre d’un gros écueil: elle oublie la défense de la biodiversité.

Climat et biodiversité « sont des enjeux majeurs pour les générations actuelles et futures et pourtant ces deux mots ne figurent pas dans le cadre constitutionnel », a regretté Pascal Canfin, directeur général du WWF France.

« Il faut profiter de cette réforme constitutionnelle pour mettre fin à ces lacunes », a-t-il poursuivi.

Ne prendre en compte que la lutte contre le réchauffement climatique peut avoir des effets pervers, craignent les ONG.

Une tribune dans Le Monde cite l’exemple de la pêche électrique, autorisée au Pays-Bas car les chaluts électriques sont moins gourmands en carburant et « plus favorables au climat ».

« Cette pratique n’en est pas moins catastrophique pour la biodiversité marine », souligne le texte signé par le philosophe Dominique Bourg ou encore le climatologue Jean Jouzel.

Idem pour les moteurs diesel, moins émetteurs de CO2 que ceux à essence mais producteurs de particules fines, responsables de décès prématurés.

Autre faiblesse du projet gouvernemental, au yeux des ONG, le passage par la modification de l’article 34 de la Constitution.

« Ce serait un échec si on se contentait de l’article 34, qui n’est pas assez contraignant », a estimé Audrey Pulvar présidente de La Fondation pour la Nature et l’Homme (FNH) créée par Nicolas Hulot.

Les ONG plaident plutôt pour une modification de l’article premier de la Constitution, qui pose les principes fondateurs de la République. Elles y voient un symbole fort et un moyen de se doter d’outils juridiques plus efficients.

Pour l’avocat Yann Aguila, la lutte contre les changements climatiques a sa place dans la Constitution car cela fait partie des « valeurs fondamentales d’une société (…) qu’on veut mettre à l’abri des changements de majorité ». La diversité biologique, elle, apparaît déjà dans le préambule de la Charte de l’environnement.

La FNH va encore plus loin et souhaite « l’inscription des limites planétaires (…) dans l’article 1 de la Constitution », ce qui aurait pour effet de limiter l’impact des activités humaines à des niveaux supportables pour la planète.

Sinon, son scénario « a minima » est de graver dans l’article 1 que « la République assure la lutte contre les changements climatiques et la promotion de la diversité biologique », a indiqué son conseiller scientifique Floran Augagneur.

L’association « Notre affaire à tous » pour le droit environnemental milite elle pour « l’insertion d’un nouveau chapitre dans la Constitution dédié à la transition écologique et solidaire », selon sa présidente Marie Toussaint.

Du côté de la présidente de la Commission des lois à l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet (LREM), le son de cloche est différent. « Il ne faut pas évacuer d’un revers de la main le fait d’inscrire ce principe dans la Charte de l’environnement », a-t-elle dit, l’essentiel à ses yeux étant de retenir le dispositif le plus efficace.

Des ONG redoutent qu’une réécriture de cette Charte, adossée à la Constitution, débouche sur une remise en cause du principe de précaution.

Pour l’avocat Arnaud Gossement, « la lutte contre le changement climatique n’a pas besoin d’une révision constitutionnelle, elle a besoin qu’on applique l’existant et les textes internationaux et européens (…) Le Conseil constitutionnel, s’il le souhaite, à partir de la Charte de l’environnement, peut parler de climat ».

« L’environnement a son siège au sein de la Charte de l’environnement, aujourd’hui l’urgence c’est de l’appliquer », insiste-t-il.

© AFP

3 commentaires

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    • Claude Courty

    Sans le moindre intérêt, si la question de la démographie humaine, à l’échelle mondiale, n’y est pas pris en considération.
    À quoi bon tenter de réduire l’émission de GES pour freiner les effets du réchauffement, si la population continue de croître et ses besoins avec elle ?

  • Les mots climat et biodiversité ne figurent peut-être pas dans le cadre constitutionnel mais je fais observer au directeur général
    de WWF France qu’il y a plus grave: ces mots figurent au dictionnaire Larousse alors que le mot « aquathermie » n’y figure même pas. Ceci alors que l’eau est au centre de la « Solar Water Economy »

    Notre intérêt est maintenant d’agir en arrêtant de tourner autour du pot de parler pour ne rien dire d’utile. Afin de respecter nos propres lois notamment la LTECV, utilisons l’énergie thermique naturelle contenue dans l’eau pour nous chauffer.

    Ceci en prélèvant au mieux selon les régions et les conditions locales l’énergie thermique contenue dans l’eau géothermale, dans celle des nappes libres, dans celle du fleuve lui même ou dans l’eau de mer pour les villes situées sur le littoral. Il est possible de le faire en s’appuyant à la fois sur les 3 piliers que constituent le social, la défense de notre environnement et en ménageant notre économie

    Est-il vraiment besoin de modifier notre constitution vu que celle-ci stipule déjà que nous devons vivre dans un monde équilibré et favorable à notre santé. Est-ce être dans un monde équilibré que d’utiliser les quelque 10% d’énergie électrique presque propre produite par nos barrages hydroélectriques pour nous chauffer avec les performances déplorable de l’effet Joule et nos problèmes de précarité énergétique ?

    Est-ce être dans un monde favorable à notre santé que de rouler dans les villes avec des moteurs à combustion ayant un rendement de 30% alors que nous pourrions le faire en mode électrique avec un rendement proche de 95%

    Les ONG n’ont assurément pas à craindre que la lutte contre le réchauffement climatique ait des effets pervers bien au contraire.

  • Si les ONG n’ont rien à craindre de la lutte contre le réchauffement climatique ils doivent par contre appréhender la croissance démographique évoqué par Claude Courty en raison de la fonction exponentelle voir le texte de mon ami Georges écrit il y a une dizaine d’années

    https://www.dropbox.com/s/z7d3qaxu3fc0ym1/LT-croissance%20%281%29.pdf?dl=0l

    Ce qu’ils doivent aussi appréhender est le comportement et l’inconscience de l’homme qui attise sans cesse le feu qu’il a lui même allumé alors qu’il pourrait pratiquement pour son plus grand bien le laisser se consommer lentement à défaut de l’éteindre grâce à la « Solar Water Economy »

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