Bruxelles (AFP) – Les Etats membres ont accepté lundi de réautoriser pour 5 ans le glyphosate lors d’un comité d’appel après plus de deux ans de débats intenses sur cet herbicide controversé.
C’est une surprise, à trois semaines de la date d’expiration de la licence actuelle, tant les divisions semblaient insurmontables, le Glyphosate étant devenu une question sociétale après son classement comme « cancérogène probable » en mai 2015 par le Centre international de recherche sur le cancer (un organe de l’OMS).
Les neuf pays qui avaient déjà dit non au cours d’un premier vote le 9 novembre ont campé sur leur position, selon des sources européennes, le scrutin se déroulant à huis clos.
La France notamment a réitéré son opposition. Dimanche, la secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique Brune Poirson avait réitéré l’engagement de Paris en faveur d’une sortie progressive du glyphosate et d’une durée plus courte d’autorisation.
« Ce n’est pas un signal clair pour une élimination progressive du glyphosate. Le combat doit continuer », a tweeté lundi après-midi la ministre luxembourgeoise de l’Environnement Carole Dieschbourg.
Cette fois, 18 pays ont soutenu la proposition de la Commission — contre 14 au tour précédent –, permettant tout juste d’atteindre le seuil de plus de 65% de la population de l’UE nécessaire pour une majorité qualifiée.
Le changement de cap de l’Allemagne a pesé dans la balance, alors qu’elle s’était abstenue le 9 novembre. Selon une source proche du dossier, Berlin a demandé des modifications au texte proposé en lien avec des restrictions sur l’usage privé du glyphosate et le respect de la biodiversité.
La ministre allemande de l’Environnement Barbara Hendricks, membre du Parti social-démocrate (SPD), s’est aussitôt émue de ce vote dans un communiqué. Elle explique avoir signifié une nouvelle fois son opposition à une nouvelle autorisation, « même sous certaines conditions » à son homologue à l’Agriculture, qui appartient lui aux conservateurs de la CSU.
« Il était clair que l’Allemagne devait s’abstenir », a estimé Mme Hendricks.
« Le vote d’aujourd’hui montre que quand nous voulons, nous pouvons partager et accepter notre responsabilité collective dans la prise de décision », s’est félicité le commissaire européen à la Santé Vytenis Andriukaitis, dans un communiqué.
La Commission avait affiché sa désapprobation face à l’absence de décision claire au sein du comité d’experts. Si l’impasse avait perduré lundi, l’exécutif européen aurait dû lui-même trancher.
Elle s’était appuyée pour tabler sa proposition sur le feu vert de ses agences scientifique, l’Efsa et l’Echa (sécurité alimentaire et produits chimiques) qui n’avait pas classé la substance comme cancérogène, s’appuyant sur d’autres études.
La Commission va maintenant adopter une décision avant que l’autorisation actuelle n’expire le 15 décembre.
La décision a provoqué la colère des ONG qui se sont battues farouchement contre une réautorisation.
« Cinq années de glyphosate supplémentaires mettront notre santé et l’environnement en danger, et c’est un revers majeur pour les méthodes agricoles plus durables », a tempêté Adrian Bebb de Friends of the Earth Europe.
Le principal syndicat d’agriculteurs européen, le Copa-Cogeca, aurait espéré encore plus, la législation européenne permettant d’autoriser une substance pour 15 ans.
« Même si c’est une bonne nouvelle que la décision ait été prise, mettant fin à l’incertitude pour les agriculteurs et leurs coopératives, nous sommes préoccupés par le fait que l’UE se soit accordée pour une réautorisation pour cinq ans et non 15 », a expliqué le syndicat dans un communiqué.
Le glyphosate est prisé par les agriculteurs pour son efficacité et son faible coût.
Une pétition officielle demandant la disparition progressive du glyphosate dans l’UE, classée « initiative citoyenne européenne », a récolté plus d’un million de signatures. Elle a été déposée auprès de la Commission qui doit y répondre d’ici le début de l’année prochaine.
© AFP
6 commentaires
Ecrire un commentaire
DESCLAUD Patrice
Verre à moitié vide pour certains, moitié plein pour d’autres; demies mesures, manque de courage, action progressive, pédagogie pour d’autres.
En fait à quoi et à qui sert l’Europe !? Défense de la santé des citoyens ou tremplin pour multinationales purement mercantiles qui n’ont que faire de la planète et pérennité de la vie de ses sols ? Hier on nous montrait comment le Salvador s’en sortait sans chimie ni OGM avec des semences localement bien adaptées (retour aux sources ancestrales).
On nous dit que ce n’est pas cher (le glyphosate), souvenez vous le prix du Round Up il y a 20 ans !!! On sait qu’on peut parfaitement s’en passer et réduire la part de tels traitements en faisant de la qualité qu’il faut payer au juste prix en réduisant les marges de la grande distribution notamment.
Alors encore combien d’années de demies-mesures, combien de mort (de moyen terme …) ?
Patrice
Ducournau
Et oui, voilà bien la preuve que la CE s’est vendue au capitalisme !! Ah c’est beau l’Europe mercantile.
Ecœurant de constater que ceux qui ont voté pour ce poison ne pensent qu’a faire du « fric » à court terme sans se préoccuper de leur propre famille. La cupidité rend aveugle (pour le moins).
pelerins
Exact, cette Europe est soumise aux dictats de la mafia agro alimenteur et aussi pharmaceutique (car cette dernière tire ses profits avec les maladies que l’autre mafia génère).
HONTE à cette Europe, qui bousille la planète en soutenant une agriculture productiviste qui conduit à la mal bouffe (riche en viande issue d’élevages intensifs cruels et polluants).
Annick Weiser
Il y a un certain temps où plutôt un temps certain, je me sentais fière d’être Européenne.
Aujourd’hui c’est un sentiment de honte, de colère et de rage qui l’habite.
L’argent et les profits sont plus importants que la santé des habitants de cette si belle planète que nous sommes en train ce détruire de plus en plus rapidement !
On nous annonce des extinctions animales et végétales …. N’oublions pas l’humain n’est qu’un mammifère parmi tant d’autres !
chaumien Maurice
La France a le droit d’interdire le glyphosate chez elle.monsieur Hulot , à vous de jouer!
il faut savoir ce que vous voulez; nous les Français ,on ne veut pas de ces poisons.
CESSONS DE DILAPIDER LES RESSOURCES de la planète et de la polluer.
Remettons les pendules terrestres à l’heure solaire et redonnons sa vraie valeur à la monnaie qui n’est qu’un moyen d’échange!
Jean Grossmann
S’il n’y avait que le glyphosate..
Voir
http://www.rivieres.info/patri/pesticides.htm
On se rappelle de la fracturation hydraulique pour extraire le gaz de schiste et la décision européenne de laisser chaque pays faire ce qu’il entend sur son territoire
L’Allemagne avait par exemple pris la décision de tolérer l’exploitation uniquement sur les régions de son territoure ne comprenant pas d’aquifère superficiel. La France ayant quant à elle décidé d’interdire totalement ce mode d’exploitation sur l’hexagone.
Si l’Europe n’a pas laissé la France interdire dès à présent l’usage du glyphosate sur l’hexagone comme elle l’a fait pour la fracturation hydraulique s’est probablement pour des raisons financières. Elle se devrait en fait dans ce cas de l’indemnité pour la perte de compétitivité consécutive à cette décision.
Bref tout est question de gros sous.
Dommage pour notre environnement, nos rivieres et la santé de l’homme et de l’animal.
Dommage aussi que l’on trouve plus souvent des chercheurs qui cherchent que des chercheurs qui trouvent.
Balendard novembre 2017