Déchets nucléaires à Bure: la construction de Cigéo décalée à 2022

Paris (AFP) – La construction du projet Cigéo, qui prévoit d’enfouir à Bure (Meuse) les déchets nucléaires les plus radioactifs, ne débutera pas avant 2022, a annoncé lundi l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), pour qui l’existence de ce site ne mettra pas fin au débat sur le nucléaire.

Dans un entretien avec l’AFP, Pierre-Marie Abadie, le directeur général de l’Andra, explique que le dépôt de la demande d’autorisation de construction, prévu mi-2018, aura finalement lieu « mi-2019 ». L’instruction de cette demande exigeant environ trois ans, « cela repousse le début de la construction à 2022 », ajoute-t-il, pour un lancement de la phase pilote autour de 2025.

« Il faut continuer à avancer avec constance mais on n’est pas à six mois près car nous avons des possibilités pour entreposer les déchets en surface », relativise le dirigeant alors que le projet est régulièrement contesté devant les tribunaux et via l’occupation permanente d’un bois appartenant au site de l’Andra à Bure.

Si Pierre-Marie Abadie juge « la guérilla judiciaire » contre Cigéo « classique », il s’inquiète davantage de « la contestation sur le terrain » qui s’est renforcée depuis l’été 2016 et qui est source de « tension » avec les habitants. « Il y a une tension permanente entretenue par des incivilités comme des dégradations de bâtiments, des tags, etc. », accuse-t-il.

Le lieu retenu pour Cigéo n’a pas d’équivalent en France. Il doit accueillir les déchets les plus radioactifs actuels et futurs du parc nucléaire français dans des galeries à 500 mètres sous terre.

Les déchets déjà produits sont stockés de manière temporaire en surface sur différents sites, les plus radioactifs ne représentant que 3% du total.

Le décalage d’un an va permettre à l’Andra d’intégrer à la fois ses propres études d’alternatives sur la conception du site et les remarques de l’Institut de radioprotection et de sureté nucléaire (IRSN) qui, le 4 juin, a notamment demandé que l’impact d’un éventuel incendie souterrain sur la partie des déchets intégrés dans du bitume soit revu.

« Le sujet, ancien, des bitumes est un enjeu pour toute la filière nucléaire, pas seulement pour Cigéo », fait valoir M. Abadie.

Face à ce risque spécifique, il faudra décider soit « de renforcer la conception de Cigéo », soit de « traiter les fûts pour les rendre inertes et les stocker en surface », explique le dirigeant. Les déchets bitumés étant variés car produits à des époques différentes, un mix de ces deux options pourrait aussi être décidé.

L’Andra attend aussi un avis prochain de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) sur Cigéo, qui prévoit un stockage réversible des déchets pendant 100 ans.

« La construction par tranche (sur plusieurs décennies) et l’exploitation vont aller de front avec une capacité d’adaptabilité très importante », souligne M. Abadie pour qui le débat sur le stockage de ces déchets « va continuer ».

Selon lui, la construction de Cigéo n’ouvrira pas davantage un boulevard aux partisans de l’atome. « Ce n’est pas parce qu’on aura Cigéo qu’on aura réglé le débat sur l’avenir du nucléaire », dit-il, alors que de fortes interrogations demeurent sur la place de l’atome dans la politique énergétique française.

Si la loi prévoit de faire passer le nucléaire de 75 à 50% dans la production d’électricité vers 2025, il n’existe aucun calendrier ni méthode pour y parvenir.

Vu qu' »une partie des déchets sont déjà produits » et qu’il existe « des capacités de stockage » temporaires, entraver le projet Cigéo en espérant ainsi porter tort à la filière nucléaire « c’est un mauvais combat », juge aussi le dirigeant, qui a rencontré Nicolas Hulot la semaine dernière.

Le ministre de la Transition écologique semble favorable au projet même s’il doit « nous pousser encore plus à réfléchir » en raison « des déchets que l’on délègue aux générations futures ». Ces déchets, « il va falloir les prendre en charge », a-t-il dit dimanche dans Ouest-France, et « mon travail est de vérifier que leur stockage se fasse dans des conditions de sécurité absolue ».

© AFP

6 commentaires

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  • Ce ne devrait pas être à Balendard de parler pour notre premier ministre mais comme Goodplanet me donne l’opportunité de le faire:

    « Je regrette de vous contredire monsieur Abadi mais il y a précisément un calendrier :celui prévu par la loi que personne n’est sensé ignorer et qui consiste à faire passer le nucléaire de 75 à 50 % dans la production d’électricité à l’échéance 2025.Quant à la méthode, je vous l’accorde, elle n’a pas été encore très bien défini. Elle pourrait consister à prendre exemple sur les Allemands qui ont réussi dans ce domaine dans des temps raisonnables puisque leur production d’électricité nucléaire qui était de 25 % du total il y a quelques années est maintenant réduite à zéro avec il est vrai quelques centrales utilisant toujours les produits faut-il pour produire l’électricité. Nous pourrions à ce niveau faire aussi bien que les allemands. Le pourcentage de réduction est sensiblement le même.

    Les Lutins thermique estiment que nous pourrions même faire mieux si nous assurions nos besoins thermique avec la « Solar Water Economy »
    Voir
    http://www.infoenergie.eu/riv+ener/source-energie/Complementarite%20des%20reseaux%20ENP.pdf

    Balendard juillet 2017

  • Excuse il faut lire

    Je regrette de vous contredire monsieur Abadie mais il y a précisément un calendrier :celui prévu par la loi que personne n’est sensé ignorer et qui consiste à faire passer le nucléaire de 75 à 50 % dans la production d’électricité à l’échéance 2025.Quant à la méthode, je vous l’accorde, elle n’a pas été encore très bien défini. Elle pourrait consister à prendre exemple sur les Allemands qui ont réussi dans ce domaine dans des temps raisonnables puisque leur production d’électricité nucléaire qui était de 25 % du total il y a quelques années est maintenant réduite à zéro avec il est vrai quelques centrales utilisant toujours les produits FOSSILES pour produire l’électricité. Nous pourrions à ce niveau faire aussi bien que les allemands. Le pourcentage de réduction est en effet sensiblement le même.

    Les Lutins thermique estiment que nous pourrions même faire mieux si nous assurions nos besoins thermique avec la « Solar Water Economy »

    • Robert BIGEAT

    La France pourrait faire mieux et plus vite que les allemands ne l’ont réalisé pour s’équiper en renouvelables, solaires et éolien, et pour plusieurs raisons.
    D’abord la France, déjà plus étendue en superficie que l’Allemagne, est aussi plus favorisée par les vents et par le soleil.
    Ensuite, le matériel tant éolien que solaire photovoltaïque est moins cher et plus performant aujourd’hui qu’il y a, même simplement 5 ans, et ses prix vont continuer à baisser.
    De plus le stockage individuel de l’électricité, qui permet l’autoconsommation intégrale, hors réseau, débute puisque ses prix ont fortement baissé dans la foulée de l’arrivée des voitures électriques qui utilisent les mêmes accumulateurs.
    Enfin la France dispose, bien plus que l’Allemagne, d’électricité hydraulique avec barrages de retenues. De la sorte, dans la journée, quand il y a de l’électricité photovoltaïque disponible, EDF peut moins vider ses retenues d’eau des barrages et ne commencer à les utiliser que quand le photovoltaïque cesse de produire. Tout ceci sans aucun investissement supplémentaire à réaliser. C’est d’autant plus intéressant avec le réchauffement climatique qui se traduit,en France, depuis deux ans déjà, par des pluies insuffisantes pour recharger les nappes phréatique mais aussi les barrages de retenues d’eau d’EDF. De plus, quand le débit des fleuves baisse, en été, il y a obligation de ralentir les centrales nucléaires avec refroidissement par l’eau fluviale, afin de moins réchauffer les fleuves.

  • En lisant Robert Bigeat je réalise qu’il a raison et que la France pourrait en effet faire mieux voire plus vite que les allemands pour combler son retard en production d’énergie renouvelable.

    Il y a à cela au moins une bonne raison : Nous partons avec un avantage puisque l’hydroélectricité représente encore 10 % du total en France alors qu’elle n’est que de 3 % en Allemagne.

    Il suffirait pour faire mieux que l’Allemagne :
    – d’arrêter en France ces « centres d’enfouissement technique (CET) qui cachent en pratique le scandale des décharges à ciel ouvert particulièrement en région PACA. Selon le fondateur de l’Ademe la production allemande d’énergie à partir de la combustion des déchets est 20 fois supérieure à la nôtre.
    – De développer dans nos plus grandes métropoles les chaufferies hybrides gaz -électricité associant la combustion et le chauffage thermodynamique telle qu’elles sont décrites dans le livre « La chaleur renouvelable et la rivière » pour que la pointe de puissance en hiver passe de 90 GW à 60 GW respectant l’objectif de fixé par nos dirigeants.
    – Ce faisant le besoin en électricité par rapport aux radiateurs électriques étant divisé par le COP du chauffage thermodynamique cela augmenterait le pourcentage de renouvelables dans des proportions qui sont loin d’être négligeables et ceci sans que l’on augmente les moyens de production. Il serait temps de se réveiller d’une longue torpeur à ce sujet
    – enfin comme le dit Mr Bigeat en se préoccupant activement de l’autoconsommation. Les compteurs Linky sont-ils au moins capables de compter dans les deux sens???

    Balendard Juillet 2017

  • Pour compréhension des troisième et quatrième alinéas de mon message précédent voir
    http://www.infoenergie.eu/riv+ener/LCU_fichiers/LT-offre-demande.pdf
    Balendard

  • Il y a une cinquième raison qui avantage la France par rapport à l’Allemagne: la démographie. La France c’est 60 millions d’habitants sur 550 000 km2 alors que l’Allemagne c’est 90 millions d’habitants sur 350 000 km2. Lorsque l’on sait que pour assurer l’indépendance énergétique des grandes villes il est nécessaire de prévoir des centrales solaires voltaique dans leur périphérie on mesure l’importance d’une telle indifférence qui fait que la France dispose de plus de surface au m2 par habitant que l’Allemagne pour implanter ces centrales solaires

    Enfin le chauffage thermodynamique assurant l’eau chaude sanitaire refroidi la rivière en été ce qui améliore la vie animale alors que les centrales nucléaires réchauffent les rivières affectant leur écosystème
    comme le fait justement remarquer Robery Bigeat.

    Balendard juillet 2017