Shanghai (AFP) – Li Chaoqing a fui, à 14 ans à peine, sa campagne pauvre pour Shanghai, capitale économique de la Chine, où il a élevé cinq enfants sur une péniche crasseuse amarrée le long d’une rivière polluée.
Mais une opération de nettoyage des cours d’eau de l’immense municipalité pourrait contraindre cet éboueur de 53 ans à déménager, comme quelque 200 autres personnes réfugiées sur ces rafiots rouillés.
La riche Shanghai attire depuis longtemps les Chinois des campagnes déshéritées, qui viennent trimer en périphérie de la mégalopole de 24 millions d’habitants.
Depuis 20 ans, Li Chaoqing habite une barge de 30 mètres de long au bord de la rivière Xinchapu. L’un des nombreux bateaux de pêche ou péniches désaffectés à avoir été investis par ces ex-ruraux vivant désormais en ville de petits boulots.
Beaucoup ont amassé suffisamment d’argent pour racheter leur embarcation, moyennant environ 20.000 yuans (2.700 euros).
Le navire de M. Li est ancré à proximité d’un cimetière envahi de détritus, où divaguent poules et oies élevées par les habitants de la rivière.
Mais, à l’intérieur de sa maison flottante, un semblant de « chez soi » a pris forme: des aquariums, des lits superposés, une chaîne hi-fi et un repas fumant disposé sur la table.
« On a travaillé très dur pour avoir une meilleure vie », raconte Li Chaoqing. « Je ne peux pas acheter d’appartement. Les prix à Shanghai sont trop élevés. »
Originaire de la province du Jiangsu (est), M. Li fait partie des centaines de millions de ruraux arrivés en ville depuis le lancement des réformes économiques à la fin des années 1970.
Il gagne aujourd’hui un maigre salaire mensuel de 2.000 yuans (270 euros) pour retirer les immondices flottant sur la rivière. Mais un appartement neuf à Shanghai coûte en moyenne plus de 50.000 yuans (6.800 euros) du mètre carré. Et le loyer du moindre petit logement avoisine les 3.000 yuans.
Shanghai prévoit le nettoyage de près de 500 cours d’eaux dans le cadre d’une campagne nationale anti-pollution. Et la ville accuse les habitants des bateaux de fortune de décharger leurs eaux usées dans la rivière.
Li Chaoqing et sa famille doivent déménager d’ici la mi-avril mais ils refusent de partir avant d’avoir obtenu davantage que les 3.000 yuans d’indemnité offerts par bateau.
« Ce navire est notre seule richesse. C’est notre maison », explique la femme de M. Li. « Comment pourrais-je l’abandonner contre si peu ? »
©AFP
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