Ottawa (AFP) – Le gouvernement canadien va imposer une taxe nationale sur le carbone à compter de 2018 pour tenter de satisfaire aux exigences de l’accord de Paris sur le climat, une mesure jugée trop timide par certains, dévastatrices pour l’économie par d’autres.
Le Premier ministre canadien Justin Trudeau a annoncé cette mesure lundi en lançant au Parlement le débat sur la ratification par le Canada de l’accord de Paris, qui vise à contenir le réchauffement sous le seuil de 2 degrés par rapport au niveau pré-industriel.
« Le gouvernement va mettre en place un prix minimum sur la pollution causé par le carbone. Ce prix sera fixé de façon à aider le Canada à atteindre ses objectifs de réduction de gaz à effet de serre, tout en assurant une stabilité et une prévisibilité accrues pour les entreprises canadiennes », a dit le Premier ministre.
Fixée à 10 dollars canadiens (6,8 euros) par tonne en 2018, la taxe augmentera ensuite pour atteindre 50 dollars canadiens (34 euros) par tonne en 2022, a-t-il précisé.
Ce prix du carbone sera imposé à partir de 2018 dans les provinces ou territoires qui n’auront pas pris de mesures compatibles pour se conformer aux objectifs nationaux de réduction de gaz à effet de serre (GES), a indiqué M. Trudeau.
« Déjà, 80% des Canadiens vivent dans une province où le gouvernement (local) impose une telle tarification », a souligné pour sa part la ministre de l’Environnement, Catherine McKenna.
Certaines provinces imposent une taxe carbone (Alberta, Colombie-Britannique) ou ont mis en place un marché d’échange et de plafonnement des émissions (Ontario et Québec). D’autres cependant, comme la Saskatchewan qui a investi dans les technologies de capture du carbone, sont hostiles à la mise en place d’une taxe.
Le gouvernement libéral s’est engagé à réduire de 30% les émissions de GES du pays d’ici 2030 par rapport à 2005, soit les mêmes objectifs que le précédent gouvernement conservateur, accusé par M. Trudeau d’avoir « abdiqué à ses responsabilités » en la matière.
« Le changement climatique est réel et se manifeste partout, a martelé Justin Trudeau. « Nous ne pouvons pas revenir sur dix années d’inaction », mais « nous pouvons faire un effort réel et sincère » à partir d’aujourd’hui.
La ratification par le Canada de l’accord de Paris doit intervenir plus tard cette semaine, après le débat au Parlement.
Les émissions de GES du Canada représentent moins de 2% du total mondial. Elle se sont stabilisées à un peu plus de 700 millions de tonnes par année, soit 208 millions de tonnes de plus que les engagements pris par le Canada à Paris, indiquait en avril un organisme parlementaire indépendant.
« Une tarification raisonnable et prévisible sur la pollution causée par le carbone va encourager l’innovation parce que les entreprises devront trouver de nouvelles manières de réduire leurs émissions et polluer moins », a justifié Justin Trudeau.
Le Premier ministre a aussi invoqué « trois motivations » personnelles pour passer à l’action: « elles s’appellent Xavier, Ella-Grace et Hadrien », a-t-il dit en citant ses trois jeunes enfants.
« L’annonce d’un prix sur le carbone est une bonne nouvelle, mais le Canada devra en faire beaucoup plus pour respecter l’Accord de Paris, à commencer par rejeter les projets polluants comme les pipelines de pétrole des sables bitumineux », a dit Patrick Bonin, un responsable de Greenpeace.
« Le Premier ministre utilise une massue pour imposer une taxe carbone aux familles canadiennes qui peinent à joindre les deux bouts », a dénoncé Ed Fast, porte-parole de l’opposition conservatrice au Parlement.
La Première ministre de l’Alberta, Rachel Notley, a conditionné son soutien au plan fédéral à la construction d’oléoducs pour désenclaver la production pétrolière de sa province et de disposer ainsi « des moyens pour financer ces politiques ».
Le Premier ministre Trudeau a convoqué les dirigeants des 10 provinces et trois territoires du pays à une conférence les 8 et 9 décembre prochains pour finaliser la stratégie canadienne sur les changements climatiques.
© AFP
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