Obligations vertes: les Etats veulent entrer dans le jeu

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La ministre de l’Environnement française, Ségolène Royal, le 12 juin 2016 à Ajaccio © AFP/Archives Pascal POCHARD-CASABIANCA

Paris (AFP) – Après les institutions internationales et les entreprises, certains États, la France en tête, manifestent désormais leur intérêt pour les obligations vertes, ces emprunts dédiés à l’environnement dont l’attractivité auprès des investisseurs ne se dément pas.

L’arrivée des États est « un très bon signe pour le marché », explique à l’AFP Jonathan Weinberger, responsable ingénierie financière pour les émissions obligataires chez Société Générale CIB.

« Plusieurs pays se penchent sur la question et la France a déclaré son intention d’être la première », poursuit M. Weinberger, citant notamment le Nigeria et la Suède.

Jusqu’à présent, le marché était dominé par des institutions internationales comme la Banque Mondiale ou la Banque européenne d’investissement d’un côté, les entreprises de l’autre.

Avec l’arrivée de la France sur ce créneau, il s’agirait de « la première émission souveraine d’obligations vertes depuis l’apparition de ce type d’instrument il y a une dizaine d’années », selon l’agence de notation financière Moody’s.

Le fait que les États expriment leur intention d’avoir recours à ces produits leur confèrent une « légitimité », même si leur absence de ce marché jusqu’à présent « démontre qu’il n’est pas encore mature », constate M. Weinberger.

Les obligations vertes en général représentent en outre une partie encore infime du total des émissions, soit environ 1% des émissions obligataires annuelles hors échéances de court terme, précise Société Générale.

Mais les engagements pris en faveur de la transition énergétique, notamment ceux issus de la COP 21, constituent « un point d’étape très important dans le développement du marché », poursuit le spécialiste.

L’émission par la France de sa première obligation verte a été annoncée en avril par le président de la République et doit avoir lieu l’an prochain.

Cet emprunt devrait servir à financer les investissements +verts+ du troisième Programme d’investissement d’avenir (PIA 3), qui prévoit d’injecter 6 milliards d’euros dans des projets contribuant à la croissance verte et la transition énergétique à partir de 2017.

En dehors du fait que les fonds doivent être affectés à une dépense particulière – ce qui n’est pas habituel dans la constitution du budget de l’Etat – « techniquement, c’est exactement la même chose qu’une obligation classique », remarque Patrick Jacq, un stratégiste obligataire de BNP Paribas.

L’Etat devra effectuer des points d’étape réguliers sur l’utilisation des fonds mais l’emprunteur « n’aura pas un coût plus élevé en émettant une obligation verte » au moment de l’opération, étaye par ailleurs M. Jacq.

Synonyme de valeur sûre, la dette française reste plébiscitée même dans un environnement de taux extrêmement bas, qui tend pourtant à rogner la rentabilité de ce produit financier.

L’intérêt des investisseurs, déjà au rendez-vous pour le marché des obligations vertes en général, ne devrait donc pas se démentir dans le cas des émissions de dette souveraine verte.

En plus de ses interlocuteurs habituels, l’Agence France Trésor (AFT), chargée de placer la dette française sur les marchés financiers, va toutefois devoir s' »adresser spécifiquement à un segment d’investisseurs » spécialisés dans l’investissement socialement responsable (ISR) « qui ne sont pas ceux qu’on rencontre habituellement », a expliqué lors d’un point presse Anthony Requin, directeur général de l’AFT.

Même si l’AFT vise à intéresser tous ses investisseurs sur ce créneau.

Globalement, « il est très clair que l’intérêt des investisseurs pour ces produits connaît une croissance soutenue », indique de son côté M. Weinberger, qui souligne que « le nombre de fonds dédiés aux obligations vertes augmente chaque année ».

Tous les voyants semblent donc être au vert pour ce segment de marché. Selon l’agence Moody’s, le volume du marché mondial des obligations vertes devrait totaliser 75 milliards de dollars en 2016, soit « un nouveau record pour la cinquième année consécutive ».

© AFP

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