Faire baisser l’usage des produits chimiques en agriculture: le défi Dephy

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Dans les années très humides, les agriculteurs utilisent plus de phytosanitaires qu'une année sèche © AFP/Archives ALAIN JOCARD
Dans les années très humides, les agriculteurs utilisent plus de phytosanitaires qu'une année sèche © AFP/Archives ALAIN JOCARD

Lorgies (France) (AFP) – Une invasion de teignes sur les choux-fleurs, et leurs feuilles se transforment en dentelle: la réduction des produits phytosanitaires en agriculture, ça ne marche pas à tous les coups. Mais les 800 fermes expérimentales Dephy relèvent le défi.

A Lorgies, non loin de Lille, sur l’un des sites expérimentaux « Dephy Expe » qui accompagnent le réseau des fermes Dephy dans le cadre du projet Ecophyto, lancé par le ministère de l’Agriculture, on expérimente l’ensemble des moyens permettant de faire baisser l’utilisation de produits phytosanitaires, herbicides et pesticides sur les cultures.

Le but, c’est « d’atteindre une baisse de 50% des indices de fréquence de traitement en mettant en place tous les leviers » connus, explique Bruno Pottiez, animateur Ecophyto de la chambre d’agriculture du Nord-Pas-de-Calais.

Avant, les techniques de culture passaient par le slogan « un problème-une solution », c’est-à-dire, « une mauvaise herbe-un phyto ». Du coup, pour beaucoup, réduire les produits chimiques est « déstabilisant », car cela implique un ensemble de pratiques différentes, raconte-t-il.

A Lorgies, on a testé des variétés plus résistantes, le décalage des dates de semis, le désherbage mécanique, les produits de biocontrôle, ou encore l’usage d’outils d’aide à la décision informatique qui permettent de choisir la meilleure date et la bonne dose de produit pour un traitement selon le type de plante, la météo, etc.

« Dans un projet +expe+ on veut un seuil de baisse de 50%, mais nous, on peut se permettre de perdre de la production, ce qu’un agriculteur ne peut pas faire », explique M. Pottiez.

Si les résultats ont été « encourageants » les années passées, plutôt sèches, l’objectif est plus difficile à atteindre, cette année, humide et propice à la dissémination des maladies.

M. Pottiez désigne les choux qui ressemblent à de la dentelle de Calais, et les blés atteints de fusariose, un champignon qui bénéficie du climat humide et qu’on ne fait disparaître qu’à grand coup de fongicides. « Au premier juillet on a mis plus de produits que l’an dernier au 1er septembre », indique-t-il.

« Dans les années très humides, on utilise plus de phytosanitaires qu’une année sèche. C’est notre métier qui veut ça », ajoute Christophe Buisset, président de la Chambre régionale d’agriculture Hauts-de-France.

Accompagner la transition

Dans les fermes participant au réseau Dephy en France, il n’est pas question d’être aussi drastique, car pour aller au-delà d’une réduction de 20% des produits phytosanitaires, il faudrait revoir tout le système de production des cultures, et le risque est de perdre en rendement.

Il s’agit donc plutôt « d’accompagner la transition sans faire de rupture », c’est-à-dire de mettre en pratique et « maximiser les efforts techniques tout en garantissant la productivité », souligne Christian Durlin, président du pôle légumes dans le Nord.

« On démarre juste, et c’est sur la durée qu’on voit le résultat », explique Anne Coupet, devant sa machine de binage mécanique dans son exploitation qui produit choux et choux-fleur à Richebourg (Pas-de-Calais). « Nous avons intégré le réseau parce que nous avons conscience qu’il faut agir autrement ».

Appartenir au réseau des fermes Dephy « permet d’aller plus vite, d’avoir plus de moyens et de bénéficier de l’émulation du groupe », explique Alexandre Deroo, producteur de légumes destinés à l’industrie à Méharicourt dans la Somme.

Le groupe de huit fermes Dephy auquel il appartient depuis six ans a réussi à faire baisser son usage des produits phytosanitaires de 19%, mais comme ce groupe était déjà en dessous de l’indice de fréquence de traitement moyen, cela correspond en fait à une baisse de 30%, selon sa conseillère à la chambre d’agriculture.

« Pour moi, c’est une satisfaction personnelle d’avoir réduit mon impact sur l’environnement », indique-t-il, après avoir enfoncé profondément une tige dans la terre pour montrer la qualité du sol de son champ de haricots.

© AFP

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  • Merci pour les infos!!! J’avoue que je n’y connais rien dans ce domaine mais d’après votre article, cela me donne une idée en tête!!!