Eurajoki (Finlande) (AFP) – Percé dans la roche sur les rives de la mer Baltique, le tombeau d’Onkalo est censé accueillir, pour l’éternité, un siècle de déchets nucléaires produits par les centrales finlandaises.
À un jet de pierre du futur réacteur EPR conçu par le géant français de l’atome Areva, Onkalo (« caverne » en finnois) sera le premier site au monde d’enfouissement permanent de déchets nucléaires à haute activité en couche géologique profonde.
A 3,5 milliards d’euros, il sera aussi le plus cher jamais conçu.
Dès 2020 et pendant une centaine d’années, la Finlande prévoit d’enfouir ici, à 420 mètres sous la surface de la Terre piquée de pins et de bouleaux, pas moins de 5.500 tonnes de déchets radioactifs.
Onkalo entraîne le visiteur à des profondeurs temporelles vertigineuses: les parois sédimentaires, qui forment une barrière naturelle contre la dissémination radioactive, affichent deux milliards d’années au compteur.
Casque de sécurité vissé sur le crâne, Ismo Aaltonen, géologue en chef de Posiva, l’entreprise maîtresse d’oeuvre du projet, assure la visite guidée.
« Comparé à une mine, on pourrait qualifier cet endroit de sec. On s’attendrait à voir plus d’eau ruisseler et ce serait le cas si nous n’avions pas comprimé les parois » dans le but de les étanchéifier, indique-t-il à une journaliste de l’AFP.
Les ingénieurs supervisent actuellement le creusement du réseau de conduits sous-terrains dans lesquels seront stockés les déchets.
Les barres de combustible sont d’abord insérées dans des étuis en fonte. Ces étuis sont ensuite glissés dans 2.800 silos en cuivre qui, dûment scellés, doivent théoriquement rester hermétiques pendant 100.000 ans. Silos qui seront insérés dans des cavités verticales condamnées par de gros bouchons de bentonite, de l’argile peu indurée, très peu perméable et souple.
Fuites ? Glaciation ?
D’autres pays, dont la France et l’Allemagne, envisagent eux aussi d’adopter cette méthode de stockage malgré les interrogations sur sa sécurité.
Certes, « il faut bien faire quelque chose des déchets nucléaires qui ont déjà été produits (…) mais des études sont nécessaires pour évaluer certains facteurs de risque » comme la perméabilité des sous-sols sur une aussi longue période, ou les actes de malveillance, estime Juha Aromaa, un porte-parole de Greenpeace Finlande.
À quoi ressemblera le site dans 100.000 ans? Que se passerait-il en cas de séisme ou d’attentat terroriste? Et s’il y avait des fuites?
M. Aaltonen reconnaît qu’il est impossible de dire aujourd’hui quelles seront dans aussi longtemps les conditions de vie à la surface d’Onkalo. Il y a 100.000 ans, l’homme de Néandertal chassait le mammouth et quittait le continent africain.
Une étude de l’université de Turku en Finlande publiée en 2015 mettait en garde contre les effets du permafrost sur l’étanchéité du tombeau dans l’hypothèse d’une nouvelle glaciation.
« Nous savons qu’à l’est de la Finlande, en Russie (…) au cours du pic de la dernière glaciation, le permafrost a atteint entre 400 et 600 mètres de profondeur », soit au-delà du niveau de stockage d’Onkalo, rappelle Matti Rasanen, chercheur à l’université de Turku.
Avant de lui accorder une licence d’exploitation, l’Autorité finlandaise de sûreté nucléaire (STUK) a demandé à Posiva de prendre cette étude en considération et de conduire des travaux complémentaires, selon Jussi Heinonen, chargé du suivi du dossier au sein de la STUK.
La malédiction des pyramides
Autre casse-tête: faut-il marquer l’emplacement du site? Si oui, comment? Dans quelle langue?
« On débat toujours de l’opportunité de signaler la présence du site par des panneaux d’avertissement. L’idée qui prévaut pourtant, en aménageant la surface, est de le rendre passivement sûr », autrement dit quasi-invisible, souligne le géologue Matti Rasanen.
« Il y a des exemples dans l’Histoire, comme en Égypte (avec les pyramides), où une malédiction devait frapper toute personne franchissant une porte » permettant l’accès au tombeau, ceci afin de dissuader les intrusions, dit-il. « Or évidemment, c’est justement là qu’on entrait ».
En 2011, le film-documentaire « Into Eternity » (« Une plongée dans l’éternité ») du Danois Michael Madsen évoquait cette pierre retrouvée en Norvège avec une inscription enjoignant de ne pas la déplacer. Ce que les archéologues se sont empressés de faire…
Pour les populations locales, l’éternité est une vue de l’esprit.
Et certains se veulent pragmatiques, comme Timo Rauvola, un maraîcher du coin qui s’est bien accommodé de la présence du nucléaire dans son jardin et estime même que le stockage en profondeur est une belle idée. « Ce sera quand même mieux que ce qui se passe dans le monde entier, avec des déchets entreposés n’importe où… », lance-t-il.
© AFP
7 commentaires
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Oskar Lafontaine
Ce n’est pas une solution pour « l’éternité », seulement pour quelques décennies, le temps de mettre au point de nouvelles technologies, d’ailleurs l’éternité c’est très long…et surtout à la fin.
Il ne peut en effet, en Finlande comme ailleurs, à Bure en France notamment, s’agir là que d’une solution d’attente, car quelques centaines de mètres de profondeur, au plan géologique, c’est très insuffisant, pour être crédible sur la durée il faudrait en effet des milliers de mètres de profondeur, au moins 4000.
D’autres solutions de neutralisation se feront forcément jour en attendant celle, idéale, que serait l’envoi dans l’espace, sur une orbite autour du Soleil, au-delà de l’orbite solaire de la Terre, de ces
trop dangereux pour y rester, déchets radioactifs, mais on en est pas encore là, donc il faut trouver, en attendant, et comme en Finlande une solution, en réalité temporaire, « présentable » pour notre époque. La « solution » suédoise, d’enfouissement, dans des tunnels creusés sous la mer Baltique, (site d’Oskarshamn), semble d’ailleurs aussi intéressante, personne n’ayant alors ces déchets sous ses pieds.
dany
On enfouit ! et on se dit : après moi le déluge …. (de feu).
Le nucléaire doit être stoppé pour le bien de l’avenir des humains.
Nous condamnons nos enfants bien avant leur naissance.
Technologie de mort.
Rozé
Cachez donc ces déchets que je ne saurais voir plus longtemps ! Le problème, c’est que cachés ou non ces déchets sont radioactifs tellement longtemps que leur dangerosité reste intacte enfouis ou non. De plus les concentrer en un seul endroit est une très mauvaise idée en cas de problème de toute sorte. De même les garder dispersés à la surface n’est pas idéal en termes économique et environnemental. En effet leur surveillance coûte cher et leur dispersion sur la surface terrestre implique des zones interdites. Néanmoins, je pense que leur surveillance obligatoire et quasi éternelle à l’échelle humaine, reste la meilleure garantie de ne pas oublier que ces déchets existent et sont dangereux.
Au final, arrêter cette industrie néfaste et polluante tant qu’on ne sait que faire des déchets est la seule bonne solution. Et ne pas se laisser prendre à la chimère de la réutilisation bénéfique de ces déchets; ça fait déjà des dizaines d’années que les techniciens du nucléaire nous leurrent sans résultat. Dans d’autres domaines tels que les énergies renouvelables les progrès sont là et s’imposent de plus en plus chaque jour.
Pan
A l’évidence Oskar, Dany et Rozé sont très mal informés. C’est l’époque qui veut ça. C’est une de nos sympathiques facultés mentales qui est que moins on connait un sujet plus on peut en parler.
Plus les atomes radioactifs contenus ont un temps de décroissance radioactive long, moins le débit d’émission d’énergie peut être élevé, contrairement au gros débit qui n’est possible que sur un temps court (la haute activité disparaît en 600 ans). A tel point qu’à la fin, pour les éléments durant des milliards d’années (qui nous racontent l’histoire de l’univers et s’inquiète peu de nous), leur niveau d’émission de rayonnement est totalement insignifiant et intrinsèquement non dangereux. Avez-vous remarqué le volume ridicule des déchets radioactifs que vous aurez produit dans toute votre vie ? à comparer au volume de CO2 et déchets toxiques chimiques éternels ? Allez et si vous êtes malades n’hésitez pas à vous faire faire un radiodiagnostic. Rien de mieux actuellement pour se faire soigner efficacement ! Si le dixième des précautions prises dans le nucléaire étaient porté sur les coups de grisou et les inondations, plusieurs dizaines de milliers de mineurs éviteraient la mort chaque année et personne n’aurait eu ces derniers jours les maisons dans l’eau.
Oskar Lafontaine
Je n’ai pas attendu votre commentaire déplacé et presque insultant, pour connaître la liaison entre durée d’une demi-vie d’un corps radio-actif et intensité de son rayonnement. Mais c’est vous qui semblez ignorer que l’uranium, le plutonium, sont des métaux lourds et que leur radioactivité n’est pas leur seul problème, le pire c’est encore leur dangerosité biologique, bien pire que celle du plomb. Ainsi il ne doit pas exister de poison chimique pire que le plutonium, même à dose infinitésimale.Et la demi-vie n’est pas tout, les éléments radioactifs se transmutent et les nouveaux éléments qui apparaissent et qui ont leur propre demi-vie, ne sont pas beaucoup moins dangereux, tant aux plans radioactifs que chimiques.
En nous entretenant de la radioactivité seulement, vous passez sous silence ce qu’il y a de pire, la mortelle dangerosité chimique de ces corps radioactifs et de leur dérivés.
Pan
Si si, ne craignez rien, il existe des poisons pires que le plutonium. L’oxyde de carbone, par exemple, qu’on rencontre dans les chaumières. Et vous semblez dénier au plomb une toxicité importante ! Vous vous trompez lourdement. C’est un vrai petit poison dans les peintures d’après guerre 39-45. Les dégâts chez les enfants dans les chambres des cités HLM et habitations humides ont été sévères, et la question ne se pose pas de savoir s’il faut le stocker à 100 m ou 4000m. ça part aujourd’hui en ordures ménagères ou déchets inertes. Et le plomb a de beaux jours devant lui avec les batteries qui permettent d’utiliser l’énergie solaire la nuit. L’important est la forme chimique, soluble ou insoluble et stabilité dans le temps. Un lingot de plutonium métal n’est pas plus dangereux qu’un lingot de plomb, sauf à se les faire tomber sur la tête.
L’insolubilité est tout l’intérêt de la vitrification et c’est très heureusement aussi une qualité du plutonium, dans les conditions naturelles. La mortelle dangerosité chimique existe pour tous les corps chimiques, question de concentration et inversement, la protection ne peut être que question de dilution.
Contrairement à ce que vous dites, j’ai écrit :
Avez-vous remarqué le volume ridicule des déchets radioactifs que vous aurez produit dans toute votre vie ? à comparer au volume de CO2 et déchets toxiques chimiques éternels ? j’inclus évidement les déchets radioactifs dans les toxiques chimiques mais je ne suis pas à 1% près.
grossmann
LE SOLEIL VA BIENTÔT COMMENCER À REMPLACER L’ATOME
Voir l’immeuble de » Mr tout le monde »
http://www.infoenergie.eu/riv+ener/LCU_fichiers/ethique.htm
Balendard juin 2016