Corrosion de cuves « extrêmement irradiantes » à l’usine Areva de la Hague


Beaumont-Hague (France) (AFP) – L’autorité de sûreté nucléaire (ASN) a demandé à Areva de « renforcer la surveillance » d’évaporateurs de son usine de retraitement de Beaumont-Hague (Manche), des cuves « extrêmement irradiantes » dont « la corrosion est plus rapide que prévu », a-t-on appris jeudi auprès du gendarme du nucléaire.

L’ASN a qu’elle « pourrait être conduite à imposer l’arrêt de l’installation (un évaporateur,n ndlr) en cas de détérioration excessive », selon un communiqué du gendarme du nucléaire. L’arrêt aurait pour conséquence une réduction du volume d’activité de l’usine, a précisé à l’AFP Guillaume Bouyt, chef de la division de l’ASN à Caen.

L’ASN exige en outre que l’industriel, en grande difficulté financière, « installe des moyens supplémentaires permettant de limiter les conséquences d’une éventuelle fuite ou rupture ».

Ces évaporateurs « extrêmement irradiants », « assurent la concentration des produits de fission, qui contiennent l’essentiel de la radioactivité » des combustibles irradiés dans les centrales, selon l’ASN. L’usine en compte six.

Les derniers résultats, en décembre, de mesures de corrosion « sont de nature à remettre en cause à moyen terme la sûreté. La tenue de ces équipements à la pression de leurs circuits de chauffe ou au séisme pourrait être remise en cause dans les prochaines années et potentiellement dès 2018 pour l’évaporateur le plus dégradé », précise le gendarme du nucléaire.

L’ASN demande à Areva d’être d’autant plus attentif que « seule une partie limitée des évaporateurs est accessible à la mesure ». Ces cuves se trouvent en effet dans des casemates en béton armé, inaccessibles au personnel en raison du niveau de radioactivité. Les mesures sont faites avec des perches articulées, précise l’ASN.

Tous les combustibles irradiés dans les centrales nucléaires françaises prennent la direction de cette usine de retraitement qui est le site qui concentre le plus de matière radioactive en Europe. Près de 5.000 personnes y travaillent.

Les parois des évaporateurs font entre 8 à 10 mm d’épaisseur contre 14 lors de leur mise en service entre 1989 et 1994, a précisé l’ASN lors d’une commission locale d’information (CLI) à Beaumont-Hague. L’épaisseur minimum réglementaire est de 5,2 mm.

Areva a indiqué qu’elle travaillait depuis 2015 sur un projet de remplacement progressif des évaporateurs à partir de fin 2021 et qu’elle respectait les demandes de l’ASN qui l’a auditionnée le 11 février. Elle va notamment baisser la température des évaporateurs.

Pour Greenpeace, la date de 2021 n’est pas tenable. « Le remplacement d’un évaporateur et du béton autour est extrêmement long, de plus, Areva devra répondre à des critères draconiens de sûreté qui n’existaient pas dans les années 1980 », a commenté le chargé de campagne nucléaire de Greenpeace France, Yannick Rousselet, interrogé par l’AFP après la CLI.

« L’affaire est extrêmement sérieuse car le remplacement d’évaporateurs va diminuer la capacité de retraitement. On risque de se retrouver avec des combustibles irradiés bloqués dans les centrales », dont les piscines de refroidissement sont déjà bien remplies, a-t-il affirmé.

Les piscines de l’usine contiennent 9.935 tonnes de combustibles usés pour une capacité de 13.990 tonnes, selon Areva.

 

© AFP

Un commentaire

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    • Oskar Lafontaine

    Il devient clair qu’Areva ne maîtrise plus les problèmes, ici de corrosion accélérée, qui apparaissent et, qu’en tout état de cause, ni Areva, ni EDF, n’ont plus les moyens financiers de limiter les conséquences dévastatrices pour l’environnement, de ces corrosions accélérées.
    Et ce n’est là qu’une petite partie des problèmes posés. Il est donc plus que temps de ralentir significativement les activités nucléaires, à tous les niveaux, car les goulots d’étranglement s’y multiplient.