Paris (AFP) – La ministre de l’Ecologie et de l’Energie, Ségolène Royal, a rendu vendredi son verdict sur le coût global du projet Cigéo d’enfouissement des déchets radioactifs à Bure (Meuse), qui faisait l’objet de chiffrages divergents, en fixant son évaluation à 25 milliards d’euros.
« Ce coût est fixé à 25 milliards d’euros aux conditions économiques du 31 décembre 2011, année de démarrage de l’évaluation des coûts », indique un arrêté signé vendredi par Ségolène Royal, et consulté par l’AFP.
« Le coût afférent à la mise en oeuvre des solutions de gestion à long terme des déchets radioactifs de haute activité et de moyenne activité à vie longue est évalué sur une période de 140 ans à partir de 2016 », précise le texte.
Le projet Cigéo, piloté par l’Agence nationale pour la gestion des déchets nucléaires (Andra), et contesté par des écologistes et des associations locales, doit accueillir les déchets les plus radioactifs (3% du total) à 500 mètres sous terre à Bure, ainsi que ceux ayant la durée de vie la plus longue.
L’arrêté « ne constitue pas une autorisation du projet ou une décision relative à son niveau de sûreté », précise cependant l’arrêté. Ce texte entrera en vigueur au lendemain de sa publication au Journal officiel, prévue dans les prochains jours.
Mme Royal a tranché sur la base d’une estimation fournie par l’Andra, de l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et des observations des opérateurs du futur projet, EDF, Areva et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA).
« Le coût arrêté constitue un objectif à atteindre par l’Andra, dans le respect des normes de sûreté fixées par l’ASN et en s’appuyant sur une coopération étroite avec les exploitants d’installations nucléaires », précise l’arrêté.
Il sera « mis à jour régulièrement et a minima aux étapes clés du développement du projet (autorisation de création, mise en service, fin de la +phase industrielle pilote+, réexamens de sûreté) », poursuit-il.
Selon des documents remis au gouvernement et rendus publics lundi, l’Andra avait évalué à 32,8 milliards d’euros le coût global de Cigéo, deux fois plus que les estimations officielles antérieures.
L’Andra avait toutefois précisé que cette estimation était un « exercice particulièrement délicat » et reconnu que des « visions différentes » étaient possibles en fonction de l’anticipation des progrès technologiques par exemple, pouvant conduire à « des différentiels de l’ordre de 30% » sur le coût global.
Pour leur part, EDF, Areva et le CEA avaient proposé conjointement un coût de 20 milliards d’euros, tandis que l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) estimait que « certaines hypothèses retenues par l’Andra et ayant un fort impact sur le chiffrage global semblaient optimistes ».
Au lendemain du chiffre avancé par l’Andra, l’action d’EDF avait chuté de plus de 5% en Bourse, le groupe ayant provisionné jusqu’ici dans ses comptes un montant inférieur à ces nouvelles estimations.
La gestion des déchets radioactifs est en effet à la charge des exploitants d’installations nucléaires qui les produisent.
Suite à la décision de la ministre, EDF a du coup annoncé qu’il passerait une charge de l’ordre de 800 millions d’euros dans ses comptes 2015, ce qui amputera d’environ 500 millions son bénéfice net annuel.
Areva, quand à lui, a chiffré l’impact sur ses comptes à 250 millions d’euros, ce qui risque d’accroître son besoin de financement, alors que le groupe nucléaire, à court d’argent frais, est en attente d’un renflouement par l’Etat, parallèlement à la cession de son activité réacteurs à EDF.
L’Andra a également pris acte de ce chiffrage, et s’est engagée à poursuivre une démarche d’innovation et d’optimisation tout au long du projet, tout en maintenant la surêté comme priorité. Elle a réaffirmé au passage que « quelles que soient les incertitudes qui peuvent rester à ce stade du projet, le coût reste (…) tout à fait supportable pour le système électrique et le consommateur ».
Cigéo doit encore être validé par le Parlement. Le gouvernement a annoncé l’an dernier qu’un texte spécifique serait présenté en 2016, après avoir tenté de faire avancer le dossier via un article de la Macron, finalement censuré par le Conseil constitutionnel.
Le calendrier du projet prévoit un décret d’autorisation en 2018 et une mise en service industrielle en 2025. La construction des installations de stockage pourrait débuter à l’horizon 2020.
© AFP
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Oskar Lafontaine
Ce chiffrage ministériel est un chiffrage purement politique à visée comptable en prévision de la communication le mois prochain des comptes financiers d’EDF puis d’Areva. pour l’année 2015, comptes déjà attendus, pas très bons….Il s’agit, pour le pouvoir politique, de les faire apparaître un petit peu moins calamiteux qu’ils le sont en réalité.
Cette mise au point « royale », donc purement politique et déconnectée des réalités industrielles impliquées par la réalisation de ce très gros centre souterrain de stockage de déchets radioactifs donc très dangereux pour des millions d’années, est tout à fait comparable à une opération de passe-passe médiatique de même type, réalisée en octobre dernier en Allemagne, sur le même sujet, mais étendu aux démantèlement en plus de l’enfouissement et opération de passe-passe, qui vit le ministre en charge de cette question, soit Sigmar Gabriel, par ailleurs vice-chancelier et candidat (mal) désigné de son parti, le SPD, pour devenir calife, pardon, chancelier, à la place du calife, pardon, de la chancelière.
Un rapport d’un très réputé cabinet d’études spécialisé, commissionné par le ministre en charge, Sigmar Gabriel et sa secrétaire d’Etat à l’environnement, Barbara Hendricks, concluait en Allemagne que les opérations impliquées allaient dépasser de 30 milliards d’euros supplémentaires, le montant des provisions déjà constituées et à venir par les industriels allemands concernés, (plus de 39 milliards d’euros à la mi-2015, soit bien plus qu’en France où il y a pourtant aussi, bien plus de travail d’Hercule à accomplir pour le nettoyage des écuries du nucléaire, bien plus vastes et multiples qu’en Allemagne. La simple communication par la bande à la mi-septembre 2015, de cette information capitale et très attendue, provoqua dans les heures qui suivirent, une chute spectaculaire de la valeur en Bourse des quatre industriels allemands concernés, déjà en mauvaise forme financière, et qui allaient , si suite financière était donnée à l’estimation du cabinet, tomber carrément en faillite, ne pouvant trouver et disposer des sommes requises. Le ministre, Sigmar Gabriel, tout comme Madame Royal en France allait le faire quelques mois plus tard, prit alors l’affaire en main et déclara officiellement du haut de ses supposées très hautes compétences techniques de ces questions nucléaires complexes, que le cabinet d’études avait été trop pessimiste, voire s’était « mélangé les pinceaux », et que les provisions déjà constituées et à venir, suffiraient. Cette déclaration, qui ne trompa personne, calma le jeu, chacun comprenant alors en Allemagne, que les industriels n’auraient rien de plus à payer, le budget de l’Etat fédéral allemand, le Bund, comme on dit de la République en France, prenant en charge le financement de l’excédent éventuel, mais quasi certain, de dépenses.
Donc en France, tout comme en Allemagne, le problèmes des coûts cachés et reportés sur le futur pendant des années et décennies aussi, de l’électronucléaire, subit un « traitement », à base de poudre aux yeux, purement politico-médiatique et surtout fondamentalement déconnecté des réalités industrielles et comptables, bien moins optimistes. c’est une variante de la méthode Coué.
Rozé
Faut il enfouir les déchets radioactifs les plus actifs ? Je ne le crois pas car la réactivité de ceux-ci est telle qu’une surveillance constante et de visu est très probablement nécessaire. Faut il concentrer ces déchets en un même endroit ou au contraire les garder dans les centrales nucléaires (en piscine par exemple); même si la multitude des sites nucléaires est assez importante, je pense qu’il vaut mieux surveiller en différents endroits des déchets à priori bien connus par le personnel de ces endroits. A l’inverse, la concentration c’est la possibilité d’automatiser, de faire des économies d’échelle, de méconnaitre le déchet banalisé avec le risque d’incident aggravé par la concentration.
Que faire de ces déchets, une fois les réacteurs nucléaires d’un site arrêtés ? C’est bien là le fond du problème et la raison de la fuite en avant ou encore de la politique de l’autruche: enfouissons ce déchet que je ne veux pas voir !
Enfin avec ces 25 milliards, combien d’installations ENR pourrait on construire et ainsi arrêter aussi rapidement que possible ces réacteurs générateurs de déchets !
Où sont le sages de ce pays et du monde ?
Grossmann
Même si cela devait coûter le double, le montant moyen de quelque 1500 euros à payer par chaque foyer fiscal français reste faible par rapport au risques qui pourrait résulter pour notre santé de la contamination radioactive des rivières et des nappes libres en communication avec elle. Nous ne pouvons pas continuer à stocker ces résidus hautement radioactifs dans des cuves en surface. Ce travail servira aussi de toute évidence pendant 2 ou 3 décennies à stocker les résidus émanant des EPR comme celui de Flamanville situés sur le littoral.
Après il faudra que le dispositif soit fiable pendant toute la durée de vie des déchets les plus virulents. Il s’agit de petits volume d’après l’ANDRA
Quitte à me répéter, il va falloir maintenant nous concentrer sur la façon dont nous consommons l’électricité. Bientôt, si nous commençons à raisonner dans ce sens le renouvelable suffira à nos besoin dans au moins un domaine: celui du chauffage de l’habitat
http://www.infoenergie.eu/riv+ener/LCU_fichiers/ESR-stockage-dechet-radioactif.pdf
Balendard