Pékin (AFP) – L’annonce par la Chine de la modernisation de ses centrales au charbon pour les rendre moins polluantes vise surtout à rassurer des Chinois mécontents du « smog » plutôt qu’à combattre le réchauffement climatique, ont estimé jeudi des experts.
Alors que la conférence sur le climat (COP21), destinée à limiter le réchauffement mondial, est entrée dans le vif du sujet, le gouvernement chinois a annoncé mercredi son intention de réduire de 60% les rejets des « principaux polluants » de ses centrales au charbon d’ici 2020, selon un communiqué publié sur son site internet.
Pékin et le nord de la Chine viennent de suffoquer ces derniers jours sous un épais brouillard polluant, un phénomène récurrent devenu l’un des principaux sujets de mécontentement de la population.
La nouvelle annonce de Pékin sur la réduction des émissions, estiment ainsi des analystes, répond principalement à cette exaspération populaire.
L’opération est censée économiser quelque 100 millions de tonnes de charbon brut et éviter le rejet d’environ 180 millions de tonnes de dioxyde de carbone (CO2) chaque année, d’après la même source.
Le texte ne précisait cependant pas quels polluants sont visés, ni à partir de quelle date de référence la réduction de 60% était mesurée.
Les mesures semblent cependant cibler une série d’émissions responsables du « smog », davantage que les gaz à effet de serre à l’origine du réchauffement climatique.
Plus grande émettrice mondiale de ces gaz, la Chine a à ce titre un rôle crucial à la COP21.
La réduction annuelle des rejets de CO2 de 180 millions de tonnes ne représenterait toutefois qu’environ 2% des gaz à effet de serre produits par le géant asiatique, estimés à entre 9 et 10 milliards de tonnes en 2013.
De même, une réduction de 100 millions de tonnes de la consommation chinoise de charbon brut équivaudrait à une baisse de quelque 2%, le pays en ayant brûlé 4,2 milliards de tonnes en 2013.
La plupart des émissions chinoises de gaz à effet de serre proviennent de la combustion du charbon, une des principales sources de « smog ».
« Réduire le smog dans les villes chinoises est impératif pour le gouvernement », a déclaré à l’AFP Lin Boqiang, directeur du Centre de recherche sur l’économie du secteur de l’énergie à l’université de Xiamen (sud-est).
« Cela est opportun que cet engagement intervienne durant la conférence de Paris, mais il est davantage axé sur la lutte contre le smog et la pollution atmosphérique », souligne-t-il.
La modernisation « concernera surtout les très petites et très vieilles centrales », selon lui.
L’ONG environnementale Greenpeace a elle salué l’annonce de Pékin, tout en soulignant qu’elle n’était pas nouvelle.
“C’était déjà inclus dans les politiques. Ce n’était probablement pas formulé ainsi avant. Ils ont choisi de le formuler de façon un peu plus explicite », explique à l’AFP Li Shuo, en charge des questions de climat et d’énergie.
Pour les experts, l’ambition de Pékin sera difficile à réaliser en raison du nombre très important de centrales au niveau national.
« Réaliser cet objectif en 2020 est toujours un très gros problème », a assuré à l’AFP Yang Fuqiang, conseiller du Natural Resources Defense Council (NRDC), une ONG environnementale.
La Chine va devoir construire davantage de centrales qui émettront davantage de CO2 et d’autres gaz afin de compenser la baisse de production d’électricité induite par les fermetures prévues, prévient-il.
Selon Greenpeace, les autorités ont déjà approuvé la construction de 155 nouvelles centrales au charbon depuis début 2015.
La Chine s’est engagée cependant à réduire la part du charbon dans son mix énergétique sous la barre des 65% d’ici à 2017, contre environ 70% actuellement.
A la COP21 cette semaine, le président chinois Xi Jinping a rappelé l’engagement de son pays de parvenir à un pic d’émissions « autour de 2030 ».
Selon les estimations, la Chine aurait émis près du double de CO2 que les Etats-Unis en 2013, et environ deux fois et demi plus que le total européen.
© AFP
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Oskar Lafontaine
La seule solution pratique et rapidement disponible dont la Chine peut disposer pour améliorer significativement, dans les années qui viennent, et non pas dans un futur lointain ou encore seulement symboliquement, par effet psychologique d’annonce, la qualité de l’air dans le pays et au-delà, c’est encore de substituer le gaz au charbon. Et comme la disponibilité de ce combustible, le méthane, en Chine est assez loin de celle du charbon, ce méthane ne pourra qu’être importé en masse et à priori d’abord de Sibérie, où les réserves disponibles sont importantes.
Or économiquement, la Sibérie est déjà presque devenue une province chinoise, les russes n’y faisant plus que de la figuration et regardant les chinois y travailler à s’emparer des matières premières, tout en engloutissant, car c’est fatiguant de regarder les autres travailler, des flots de vodka.
Logiquement cette quasi occupation chinoise de fait de la Sibérie, facilitée par l’inertie alcoolique des russes, occupation par le travail et non par la force militaire, ne peut conduire qu’à un recul de la puissance russe, puissance déjà plus théorique que pratique et qui s’érode en plus chaque jour qui passe davantage, mais c’est là une autre histoire.
L’exemple de la pollution de l’air en Chine, par le charbon essentiellement mais pas seulement, devrait nous montrer les limites d’un développement économique anarchique qui ne peut conduire qu’à un désastre humain.
L’excès en tout est nuisible, spécialement dans le domaine énergétique, où chacun peut constater que la préférence chinoise pour le charbon, ne mène qu’à une impasse mortelle, il en ira de même en France, d’une façon plus soudaine, avec sa préférence suicidaire pour le nucléaire.