Sivens: que sont les zadistes devenus?

Sivens

Des activistes ramassant des détritus après avoir été expulsés de Sivens, le 11 mars 2015 © AFP/Archives Remy Gabalda

Sainte-Colombe-en-Bruilhois (France) (AFP) – « On l’avait dit. On lâche rien ». Malgré l’expulsion en mars de la « zone à défendre » de Sivens (Tarn), les ex-zadistes poursuivent « la lutte » sous toutes ses formes: sur d’autres Zad, dans des squats, des fermes collectives.

Après les prairies grasses de la zone humide de Sivens, l’âne « Sonic » doit dorénavant se contenter de l’herbe rare du jardin d’une maison transformée en squat. La mascotte de Sivens avait failli être sacrifiée lors de l’expulsion de la Zad tarnaise, le 6 mars, quatre mois après la mort du jeune écologiste Rémi Fraisse tué par l’explosion d’une grenade des gendarmes. Mais « Sonic » a retrouvé une pâture, comme ses maîtres.

« Ici, la lutte continue », résume Max, un zadiste au crâne à moitié rasé qui a « tout perdu » lors de l’expulsion. « Dix ans de ma vie: mon matos de cirque, mon camion qui était mon habitation, mes affaires… « , raconte cet ancien clown qui a vécu un an à Sivens. « Je suis parti dans un squat puis ici », à Sainte-Colombe-en-Bruilhois (Lot-et-Garonne).

Dans cette banlieue d’Agen, une Zad a été installée en décembre 2014 contre un projet de ligne TGV et de création d’une technopole sur des terres agricoles.

De nombreux anciens de Sivens ont retrouvé une famille à Agen, occupant des maisons dont les propriétaires ont été expropriés et un champ où ils ont bâti un impressionnant lieu de vie.

« Si on est expulsés, on recommence. Même s’ils nous crament la cabane, on la refera dix fois mieux », assure Pase, un ancien de la Zad tarnaise, en faisant visiter son « Anarchietecterie », une immense cabane qui peut largement rivaliser avec les anciennes baraques de Sivens.

Chassez un zadiste, il reviendra encore « plus motivé », selon Pase, crête fièrement dressée. « On l’avait dit. On lâche rien », lance-t-il en répétant le mot d’ordre que s’était donné Sivens.

« A Sivens, on s’est fait grave avoir. Mais ici, on a construit dès le début dans l’optique de voir arriver 4-500 GM » (gendarmes mobiles), avertit le jeune zadiste en référence aux centaines de membres des forces de l’ordre qui avaient évacué Sivens.

« On a de l’eau et de la nourriture pour tenir 15 jours de siège », assure Alain, un ancien militaire qui a vécu neuf mois à Sivens. Il désigne le gigantesque mirador construit sur la Zad de Sainte-Colombe, avec tunnels et douves.

Beaucoup d’anciens du Tarn ont rejoint la Zad d’Agen, « la petite soeur » de Sivens, ou celle de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), nommée « mère des Zad » car créée dès 2010, en opposition à un projet d’aéroport.

Certains en revanche ont rejoint la « bébé Zad » tout juste créée près de Tarbes, à Bordères-sur-l’Echez (Hautes-Pyrénées), contre un projet d’usine de traitement des déchets.

Entre un camp de gitans et une déchetterie aux odeurs nauséabondes, la dernière née des Zad regroupe moins de dix occupants mais prouve que le mouvement s’élargit, selon les zadistes. Car, cette fois-ci, ils ont été appelés par les riverains eux-mêmes, lassés de ne pas être entendus.

« Le mouvement zadien ne s’arrêtera jamais », en conclut Pétof, vétéran zadiste de 62 ans qui a été de toutes les occupations avant de dérouler son sac de couchage à Bordères.

« L’expulsion de Sivens n’a pas vraiment découragé les gens », lâche un autre ancien.

« Ceux qui veulent continuer la lutte l’ont fait, sous toutes ses formes »: s’installer sur d’autres Zad, mais aussi dans des squats ou rejoindre un « éco-lieu ».

Hélios est de ceux-là. Jeune ingénieur agronome responsable du potager à Sivens, il participe aujourd’hui à une ferme collective dans le Tarn. « Je vis un idéal de vie collective » que beaucoup d’anciens de Sivens « ne peuvent plus quitter », dit-il.

Mais quelle que soit la nouvelle voie choisie, les anciens de Sivens gardent à l’esprit la relance possible du projet de retenue d’eau, dont une version allégée est toujours envisagée.

« S’il faut réoccuper, on ira », assure ainsi Max. « On est toujours prêts ».

© AFP

Un commentaire

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    • Damien

    L’autorité est désemparée face aux divers changements que subit la planète. Au lieu de s’adapter, elle se fige dans le conservatisme des dictateurs. Pourtant les dirigeants d’aujourd’hui sont les crétins de mai 68. Ils ont pris le pouvoir au nom de la liberté et du changement. Les voilà enfoncés dans leur bourgeoisie urbaine. Peur du changement.