Acapulco (Mexique) (AFP) – Dans les années cinquante, Acapulco était dans l’une des destinations favorites des stars d’Hollywood. Mais aujourd’hui, devenue la capitale du meurtre au Mexique, la célèbre cité balnéaire de la côte pacifique est désertée par les touristes étrangers.
Chaque jour entre deux et six personnes sont tuées à Acapulco, selon les autorités judiciaires de l’Etat de Guerrero, crimes souvent attribués aux cartels de drogue.
Les images des légendaires plongeurs de la Quebrada, s’élançant du haut de la falaise au soleil couchant, sont peu à peu remplacées par celles des cadavres qui apparaissent quotidiennement dans la ville.
Ce soir-là, c’est un corps étendu dans une mare de sang, entouré de vingt cartouches, qui attire les curieux qui prennent des photos avec leurs téléphones portables, devant un hôpital.
« Mon fils est innocent » hurle une femme, agenouillée devant le corps de son fils, âgé de trente ans, vendeur dans une boutique, tandis que les enquêteurs effectuent des relevés d’indices.
Au cours de cette même soirée, deux autres fusillades ont eu lieu dans cette station balnéaire à la baie réputée.
Les autorités sont également visées. Un responsable municipal a été tué ce mois-ci alors qu’il circulait sur une des principales avenues, au volant de son véhicule. Samedi dernier, un membre du conseil municipal d’Acapulco a été abattu en plein jour tandis qu’il se rendait à la périphérie de la ville.
Selon une enquête sur la perception de la violence, 88,5% des habitants d’Acapulco se sentent en insécurité dans leur commune, chiffre le plus élevé de tout le Mexique.
Entre janvier et mai, au moins 336 personnes ont été assassinées à Acapulco, soit une augmentation de 42% par rapport à la même période l’an passé, selon des chiffres officiels publiés par le quotidien El Universal.
Sur les huit premiers mois de l’année, ce sont plus de 500 personnes qui ont été tuées au total, selon ce quotidien.
Tandis que les affrontements entre groupes de criminels augmentaient entre 2008 et 2012, le nombre de touristes étrangers, lui, a commencé à chuter.
En 2009, 30.000 étudiants américains venaient effectuer leur « spring break » (congé de printemps) à Acapulco. Deux ans plus tard, ils n’étaient plus que 500 à s’aventurer dans la moiteur tropicale de la station.
« On voyait ces jeunes se détendre dans les piscines des hôtels et dans les boîtes de nuit. Bien que beaucoup de personnes n’aimaient pas la façon dont ils s’amusaient, beaucoup aujourd’hui veulent leur retour », indique un manager d’un hôtel qui a requis l’anonymat.
Le département d’Etat américain a demandé à ses ressortissants de ne pas s’enfoncer à plus de deux blocs du boulevard principal qui longe la baie.
« On ne voit pas de touristes étrangers ici » indique Adrian Montoya, 25 ans, qui travaille dans une boutique de l’aéroport. « On voit beaucoup de personnes vivant à Mexico. Les étrangers ne viennent pas ».
L’industrie de la croisière s’est également éloignée vers d’autres rivages. Seulement sept bateaux ont accosté dans le port l’an dernier, contre plus de 150 cinq ans plus tôt.
« Sans sécurité, aucune compagnie de croisière ne veut débarquer à Acapulco », reconnaît le président de l’Association des agences de voyages d’Acapulco, Juan Pedro Falcón Moreno.
Le commerce local en a logiquement été très affecté. Au moins 900 commerces ont fermé cette année, tandis que certains boîtes de nuit n’ouvrent plus que pendant la haute-saison. D’autres ont tous simplement mis la clef sous la porte face aux extorsions du crime organisé.
Le nouveau maire de la ville, Evodio Velázquez Aguirre, espère toutefois le retour des touristes étrangers en 2016. Pour cela, il a décidé de renforcer la sécurité dans la zone touristique, faisant appel à la Gendarmerie nationale, aux polices fédérales et de l’Etat, dans le cadre d’une opération baptisée « Bouclier Acapulco ».
© AFP
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Paul Sven
Ce qui est surtout arrivé, dès la fin des années 90, c’est que (faute de plages comme il s’en trouve à Cancun, ou de tradition préservée comme à Puerto Vallarta) la déliquescence du parc touristique d’Acapulco n’était plus en mesure d’attirer les touristes étrangers. Pour compenser les hôtels ont pratiqué des prix propres à attirer les personnes à petits revenus de la capitale. C’est dans ce sillage qu’à suivi la petite pègre et toutes les combines qui vont avec. La plupart des meurtres n’est pas attribuable aux « grands cartels », ils ont d’autres chats à fouetter, mais aux nombreux gangs qui tentent de se tailler des « territoires ».
Dans un premier temps, c’était une bonne chose que les familles mexicaines puissent profiter des plages de leur propre pays, qu’il n’y en ai pas que pour les gens du Nord, le problème est que la sécurité n’a pas suivi (les gendarmes et les « méchants » travaillent souvent main dans la main) et que, oui, Acapulco est devenu un autre endroit où la vie ne vaut pas un gros sac de Pesos. L’an dernier, j’ai littéralement provoqué l’hilarité d’un chauffeur de taxi au simple fait de boucler ma ceinture. C’est tout dire.
Pour faire revenir le « touriste » à Acapulco, en plus d’instaurer la sécurité (comment ?), il faudra réinvestir massivement dans le parc hôtelier, dans la restauration, retaper la ville et surtout nettoyer et mettre en valeur la baie. Sans elle, tout le reste est voué à l’échec.
Il reste à convenir que le Mexique reste un des pays les plus fascinants, qui deviendra un très « grand » pays le jour où il aura vaincu ses démons.