EDF pourra bien demander à être indemnisé pour les fermetures de réacteurs

EDF

Le siège d'EDF, le 4 août 2015 à la Défense, près de Paris © AFP/Archives KENZO TRIBOUILLARD

Paris (AFP) – EDF pourra bien demander une indemnisation s’il est contraint de fermer des réacteurs du fait de la loi sur la transition énergétique, selon l’avis rendu jeudi soir par le Conseil constitutionnel, un enjeu « potentiellement ruineux » pour l’Etat selon le député de l’opposition Hervé Mariton.

Le Conseil constitutionnel a validé jeudi la loi sur « la transition énergétique pour la croissance verte », qui fixe des objectifs de réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité et dans la consommation des énergies fossiles.

Elle prévoit aussi que la capacité du parc nucléaire français soit désormais plafonnée à 63,2 gigawatts, soit la puissance actuelle des 58 réacteurs (19 centrales) qu’il comprend, tous exploités par EDF.

Parmi les points abordés dans sa décision, le Conseil a considéré que la loi n’empêchait en rien l’exploitant de « prétendre à une indemnisation du préjudice subi » s’il ferme un réacteur pour respecter ce plafond. Et ceci alors qu’un article prévoyant explicitement une telle indemnisation et introduit dans le projet de loi par les sénateurs avait été retiré ultérieurement du texte.

Ainsi, si EDF vient à fermer la centrale alsacienne de Fessenheim (Haut-Rhin) ou d’autres réacteurs, parallèlement à l’entrée en service de l’EPR de Flamanville (Manche) prévue au 2e semestre 2017, pour respecter ce plafond, le groupe sera bien en droit de réclamer à l’Etat une compensation de son manque à gagner.

Hervé Mariton, député Les Républicains de la Drôme et rapporteur du budget de l’écologie à la Commission des finances, a mis en garde vendredi contre le coût financier d’une telle indemnisation, une question qui fait débat depuis le début du quinquennat.

« L’enjeu est potentiellement considérable », a déclaré à l’AFP le député qui l’évalue « en milliards pour Fessenheim et en dizaines de milliards sur l’ensemble de la stratégie de capage » (ou plafonnement) du parc nucléaire. « C’est un point contesté par le gouvernement jusqu’à présent (…) et potentiellement ruineux », a-t-il insisté, tout en relevant que le Conseil constitutionnel n’avait pour sa part avancé « aucun chiffre ».

Selon un rapport coprésenté par M. Mariton l’an dernier, le coût global de la fermeture de la centrale de Fessenheim s’établirait à quelque 5 milliards d’euros, dont 4 milliards d’indemnisation pour son exploitant EDF. Un montant qui avait été jugé « farfelu » par la ministre de l’Ecologie et de l’Energie, Ségolène Royal.

 

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3 commentaires

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    • Oskar Lafontaine

    Au delà de la constatation, à cette nouvelle occasion, de l’incompétence profonde, sur certaines questions, du Conseil Constitutionnel dont les membres, de formation trop juridique, vivent dans un Olympe que les basses contingences et réalités financières autant que techniques du monde réel, ne sauraient atteindre, force est de constater qu’il ne s’agit là, de la part de ce Conseil « hors sol », que d’un coup d’épée dans l’eau sale et pestilentielle du marécage nauséabond du nucléaire, et coup d’épée qui ne fera certainement pas jaillir, de ce marécage, une fontaine d’or en faveur d’EDF.
    L’Etat n’aura en effet à verser d’indemnités à EDF pour l’arrêt de réacteurs, que dans la mesure où cet arrêt ferait perdre de l’argent à EDF, or la réalité c’est que l’arrêt de certains réacteurs et à terme de tous, loin de faire perdre de l’argent à EDF, lui en fera au contraire économiser.
    Dans ces conditions, cette interprétation hasardeuse, par le Conseil Constitutionnel, ne débouchera jamais sur un paiement effectif d’indemnités à EDF, ou alors au mépris des réalités comptables de base, donc en maquillant les comptes.
    Car EDF, qui a encore perdu de l’argent en 2014, au vu de son bilan fourni le 12 février 2015, à exploiter son parc trop grand de 58 réacteurs, n’a pu verser deux milliards d’euros d’agios à son actionnaire principal, l’Etat, qu’en souscrivant un emprunt de quatre milliards d’euros qui a alourdi d’autant son endettement déjà que trop important.
    Seul l’arrêt de plusieurs réacteurs, et pas seulement des deux de Fessenheim, permettrait à EDF de sortir comptablement du rouge, car l’électricité qu’ils produisent, trouve de plus en plus difficilement preneur, et à des prix de plus en plus vils. Les renouvelables en effet, qui produisent pour toujours moins cher et sont plus souples et simples d’emploi que les réacteurs nucléaires, lui taillent en effet des croupières et cette situation ne peut aller qu’en s’aggravant, dispensant l’Etat, en dépit de cet avis inepte du Conseil Constitutionnel, d’avoir à verser à EDF la moindre indemnité pour l’arrêt qu’il déciderait de son chef, de réacteurs nucléaires vieillissants et de plus en plus dangereux à continuer de faire fonctionner, et d’ailleurs plus pour occuper les techniciens sur place, que pour l’électricité encore éventuellement produite.

    • NADAUD

    EDF vient déjà sans la moindre gène de nous facturer rétroactivement une hausse d’électricité sur 2012/2013 ce qui est du jamais vu (imaginez votre super marché ou votre garagiste faire de même !)

    Et maintenant le Conseil Constitutionnel lance le droit à indemnisation sur notre dos pour quelque chose que nous possédons !

    Hors tout jugement sur le nucléaire, ces réacteurs ont été construits avec EDF à 100% propriété de l’état à l’époque, donc avec notre argent venant de nos impôts, ils nous appartiennent donc par le haut de la holding France, même si maintenant une petite partie a été privatisée (privatisée au nom de quoi d’ailleurs ?)

    Nous allons payer à nouveau une seconde fois par le biais des copieuses hausses des tarifs EDF à venir, accordées certes pour le rachat-sauvetage d’une partie de l’agonisant AREVA, mais surtout pour digérer le coût monstrueux du « grand carénage » des vieux réacteurs.
    Ces dépenses de « carénage » sont en effet indispensables vu l’incapacité chronique de nos experts actuels chez EDF+AREVA à construire à la place un EPR que ce soit en France ou en Finlande.
    Mise en route toujours plus loin, (voire jamais) mais coût exorbitant et toujours rajusté à la hausse.
    Ce sera d’ailleurs encore nous contribuables qui allons payer, que ces EPR rentrent en service ou non, sans d’ailleurs voir la décision d’une sanction d’un seul responsable pour ces gabegies (dans le privé il y aurait eu des comptes à rendre depuis longtemps).

    Et maintenant une assemblée de caciques, incompétents sur l’énergie et sa place essentielle dans l’avenir de la France, ouvre le droit à nous faire payer une fois encore dans le futur, nous et les générations à venir.

    A force de charger le baudet, il finira par crever et j’ambitionne autre chose pour nos enfants et petits enfants.
    Et si nous lancions une action de groupe en tant que contribuables lésés ?

    • Oskar Lafontaine

    Tous les arguments alors avancés, en mars 1974, quelques semaines avant la mort de Pompidou, par le gouvernement de l’époque, celui de Messmer, encore un gaulliste, (culte gaulliste du nucléaire) pour s’excuser d’avoir à lancer ce qu’on allait appeler le « tout nucléaire », ce sont depuis longtemps déjà évaporés au soleil des réalités financière, comptables et de la mondialisation. Et les nucléocrateux se rabattent piteusement,depuis quelques années, en se raccrochant aux branches, à cet l’argument exagéré du CO² et argument qui n’était jamais avancé à l’époque ni même 15 ans plus tard, alors que les renouvelables, du début de leur cycle à sa fin, en rejettent bien moins, de CO², que le nucléaire, pensons par exemple aux monstrueux rejets de CO², depuis 2007, du chantier monumental, à plus de 3000 ouvriers sur place, de Flamanville par exemple.
    Les renouvelables maintenant, massacrent sans effort ce nucléaire d’illusions entretenues, pitoyable construction sur le sable, énième erreur technocratesque, d’énarques en chambre et tireurs de plans sur la comète de l’électricité à gogo, et des impôts au compteur, grâce au nucléaire.
    Dès septembre 1945 E. Nahmias, un scientifique français de haut niveau, spécialiste des rayonnements, avait pourtant prévenu, et même De Gaulle a pu lire son texte, largement publié à l’époque, (Science et Vie) que, je cite : « l’énergie nucléaire ne ferait pas baisser le montant des factures d’électricité ». On sait maintenant qu’elle avait même le pouvoir de les faire monter nettement plus vite que l’inflation. Et le pire, qu’E.Nahmias n’a pu imaginer, c’est qu’on a encore rien vu. Même hors catastrophe nucléaire majeure en France, démantèlements et déchets, vont faire exploser les factures. On peut trembler d’effroi simplement en prenant connaissance des montants retenus par les allemands et les suisses, dont le sérieux ne peut être mis en cause, pour ces deux postes de dépenses obligatoires, liées au nucléaires, soudées à lui, des déchets et démantèlements, et montant en Allemagne encore réévalué tout récemment, par un rapport technique commandé par le gouvernement à Berlin, réévalués de 30 milliards d’euros en plus, excusez du peu, ce qui a aussitôt fait plonger en Bourse les titres (actions) des entreprises allemandes d’électricité. Pour la France qui a fait au moins cinq fois plus d’installations nucléaires que les allemands, on dépasserait allègrement, en retenant les évaluations allemandes, les 400 milliards d’euros, où les trouver ? Sous les sabots d’un cheval ?Les irresponsables depuis plus de 40 ans maintenant, ce n’étaient pas les anti-nucléaires, qui avaient bien les pieds sur terre, eux au moins, mais les partisans rêveurs et déconnectés des réalités, et qui souhaitaient le nucléaire à tous les étages.