Saint-André-le-Bouchoux (France) (AFP) – Dans l’Ain, le département aux 1.000 étangs, on n’avait plus vu ça depuis la grande sécheresse de 1976. Il reste moins de 30 centimètres d’eau dans les étangs, des rivières sont à sec et les poissons à l’asphyxie.
Le paysage n’est pas commun pour la région: les étendues d’eau se vident, la terre se craquelle en bordure. Sur les roseaux, la démarcation jaune témoigne bien que le niveau de l’eau a beaucoup baissé.
« Un étang en Dombes fait en moyenne 70 centimètres de profondeur. Donc, si on enlève 50 centimètres, il ne reste plus rien », explique Sylvain Bernard, conseiller piscicole à la Chambre d’agriculture de l’Ain.
« L’espace de vie des poissons s’est resserré: ici, d’habitude, ils ont 10 hectares, aujourd’hui ils sont réunis sur un hectare », poursuit Francis Ballandras, devant son étang à Saint-André-le Bouchoux. Il est un des principaux producteur de carpes, brochets et sandres de cette région, d’où provient une bonne partie des poissons d’étangs de France.
Avec la baisse du niveau de l’eau, le banquet est ouvert pour les oiseaux prédateurs, à commencer par les aigrettes, qui n’ont qu’à se baisser pour ramasser leurs proies.
« Moi je n’avais plus vu ça depuis 1976. Et la différence est que cette année le thermomètre a souvent atteint les 40 degrés, faisant grimper la température de l’eau à 29/30 degrés. A ce compte-là, il nous faudrait des poissons tropicaux car nos sandres et nos brochets ne tiennent plus dans ces conditions », poursuit Jean-Luc Payet-Pigeon, vice-président du Syndicat des propriétaires et exploitants de la Dombes.
Pour limiter les dégâts, les exploitants font tourner à plein régime des aérateurs pour oxygéner l’eau, engendrant des coûts d’énergie supplémentaires. Dans les cas les plus critiques, on procède à des pêches de sauvetage avant que les étangs ne s’assèchent complètement.
Mais d’ores et déjà, une très forte mortalité est à déplorer. « Moi, sur une production de 60 tonnes, je m’attends déjà à 10% de pertes », estime Francis Ballandras.
Dans les rivières du département, les pêcheurs amateurs en sont au même point que les pisciculteurs professionnels.
« Nous ça fait déjà cinq semaines que nous procédons à des pêches de sauvetage: on va sauver les poissons dans les cours d’eau quasiment à sec pour les mettre dans un autre où le débit est meilleur », raconte Marc Rollet, président de la Fédération de la pêche de l’Ain.
Car, en plus, « quand le débit est bas, les algues prolifèrent, ce qui bouffe tout l’oxygène des poissons », rappelle le pêcheur.
La Bresse, la Dombes, le Suran et les petits affluents de la rivière Ain sont les secteurs les plus touchés. Et si les pêcheurs recommandent le « no-kill » de leurs prises, pour l’instant la pêche n’est pas interdite comme elle peut l’être dans certains cours d’eau de Côte-d’Or, par exemple.
A la préfecture de l’Ain, on juge la situation « préoccupante », même si on estime que les trois lâchers d’eau exceptionnels faits en juillet ont permis de limiter les dégâts pour les rivières.
Mais pour les propriétaires et exploitants des étangs de la Dombes, le contexte est plus que seulement préoccupant car ils ne sont pas en mesure de réalimenter leurs piscicultures en eau. Ils ont d’ailleurs déjà demandé aux ministères de l’Écologie et de l’Agriculture l’ouverture d’un dossier calamités sécheresse.
Et maintenant ils attendent la pluie comme le Messie car, sans eau, « il ne va guère rester de poissons en Dombes cette année ».
© AFP
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