Paris (AFP) – La ministre de la Justice Christiane Taubira présentera avant l’été un projet de loi visant à inscrire dans le code civil la notion de « préjudice écologique » et le principe de réparation de ce préjudice.
La garde des Sceaux s’est exprimée mercredi dans un message enregistré diffusé en clôture d’un colloque sur la criminalité écologique organisé par « Le Monde », a indiqué jeudi la chancellerie confirmant une information du quotidien.
Le texte qui comprend quatre articles prévoit le principe d’une réparation « par priorité en nature » du préjudice écologiste, c’est à dire l’idée d’une remise en état du milieu dégradé aux frais de celui qui en est jugé responsable, selon le principe du pollueur-payeur. A défaut, une indemnisation peut être envisagée en remplacement.
« Lorsque l’auteur du dommage a commis intentionnellement une faute grave, un juge pourra aussi le condamner à une amende civile qui ne pourra pas être supérieure à 2 millions d’euros, sauf s’il s’agit d’une personne morale. Dans ce cas, l’amende pourra être portée à 10% du montant du chiffre d’affaires mondial hors taxe le plus élevé » réalisé lors d’un exercice précédent, précise le texte.
Le projet liste également les personnes qui auront qualité pour demander cette réparation parmi lesquelles figurent l’État, le ministère public, les collectivités locales et groupement des territoires concernés ainsi que les associations de protection de la nature.
Le texte fait également référence à un « fonds de réparation environnementale » qui pourrait être créé sur le modèle du fonds Barnier pour les catastrophes naturelles.
Ces dispositions s’inspirent d’un rapport de l’ex-conseiller d’État Yves Jégouzo remis en octobre dernier à Christiane Taubira et font suite à des consultations des acteurs et professionnels de l’environnement.
D’autres consultations sont prévues et le texte devra passer le filtre des arbitrages interministériels avant une présentation au conseil des ministres et un débat au parlement.
C’est la troisième fois que la ministre manifeste ainsi sa volonté de faire aboutir ce projet depuis que la Cour de cassation a confirmé en septembre 2012 la responsabilité de Total dans le naufrage du pétrolier « Erika » en 1999 au large des plages bretonnes.
Mais le projet bénéficie cette fois d’un contexte favorable avec la tenue à Paris de la 21e conférence pour le climat en novembre et décembre 2015.
La chancellerie travaille également sur un volet pénal et diffusera avant la fin février une circulaire aux parquets pour coordonner leurs actions dans les dossiers d’atteinte à l’environnement.
© AFP
7 commentaires
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car
Pour une fois qu’elle veut faire quelque chose d’intelligent ! !
moinard
Enfin !
pielbri
Ça va pas faire peur à grand monde, puisque le plaignant devra prouver que le pollueur a « commis intentionnellement une faute grave », sinon, pas d’amende. La négligence et l’accident grave qui en résultent seront exclus. Et on sait comment les multinationales « réparent » et « compensent ». Avis aux lobbyistes: il suffirait que lors du débat parlementaire, le texte soit modifié pour que seules les associations agréées puissent porter plainte et la loi ne servira vraiment plus à rien. Christiane veut faire la bonne élève en vue de la COP21? Alors, pourquoi n’appuie-t-elle pas la création d’une cour pénale chargée des écocrimes et écocides?
Oskar Lafontaine
Wy not ! Pourquoi pas !
Et quand ce texte sera passé, une gigantesque catastrophe nucléaire se produira en France même, qui impactera une bonne partie de l’Europe, et il ne restera plus qu’à appliquer sa loi pour dédommager, en nature ou en euros, tous les autres européens affectés. Cherchez pas, ça fera des milliers de milliards d’euros…,que l’on a pas.
hubert
Une bonne initiative de notre Ministre de la Justice. J’aurais néanmoins aimer que ce projet soit présenté par Ségolène Royal, notre Ministre anti-écologie, qui est toujours aux abonnés absents quand il s’agit de protection de l’environnement. Merci Madame Taubira.
Hug
Super projet! Idée brillante! Intention louable!
Que notre ministre garde cependant à l’esprit que c’est probablement l’Etat qui sera le plus poursuivi et en particulier les armées!
pielbri
@ Oskar Lafontaine: La gigantesque catastrophe nucléaire est d’ores et déjà écartée de cet embryon de texte, puisque tu devras prouver la faute grave et intentionnelle (donc non accidentelle) avant d’espérer une indemnisation potentielle si l’entreprise a les moyens. Et ne t’inquiètes pas: si par exemple EDF était condamnée, sa responsabilité serait limitée à 7 milliards d’euros (10%CA annuel). Seule espoir: la reconnaissance par la cour pénale internationale de l’écocide comme crime contre l’humanité, comme le réclame « end ecocide on earth ».