La France, pays du nucléaire, semble insuffisamment préparée à un accident

pays du nucléaire

Un employé quitte une zone de sécurité de la centrale nucléaire de Fessenheim le 9 avril 2013 © AFP/Archives Sebastien Bozon

Flamanville (France) (AFP) – Périmètres d’évacuation étriqués, sirènes d’alerte inaudibles, communications défaillantes, chaos prévisible: quatre ans après Fukushima, la France, dont le réseau de réacteurs est l’un des plus denses du monde, semble encore insuffisamment préparée à un accident nucléaire.

Les survols de sites nucléaires par des drones et les attentats de janvier ont relancé l’inquiétude d’élus locaux, qui depuis l’accident nucléaire japonais dénoncent « l’ineptie » des plans d’urgence, ces « périmètres des plans particuliers d’intervention » (PPI) prévus autour des centrales.

Alors qu’à Fukushima un périmètre de 20 km a dû être évacué, les PPI français envisagent une évacuation dans des rayons de 2 ou 5 km seulement autour des centrales. Le préfet tranche le jour de l’accident en fonction de sa gravité.

Dans un deuxième périmètre de 10 km de rayon, une mise à l’abri de la population, là où elle se trouve, est envisagée. Et les habitants doivent avoir chez eux des comprimés d’iode. Ces médicaments ne protègent pas de toutes les radiations mais, pris rapidement, ils permettent d’éviter des cancers de la thyroïde.

Dans ce contexte, le président de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), Pierre-Franck Chevet, reconnaît que « les principes d’élaboration des PPI et les périmètres associés doivent être réexaminés ».

Bordeaux, quatrième métropole de France, soit 720.000 personnes à 45 km des réacteurs du Blayais, a demandé en novembre une extension du PPI de la centrale à 80 km.

L’association nationale des commissions locales d’informations (Anccli) réclame un périmètre de 80 km pour tous les sites nucléaires. Les « Clis » regroupent autour de chaque site nucléaire élus, syndicats, scientifiques, voire écologistes.

Au Japon, les communes concernées doivent désormais préparer une évacuation sur 30 km, un rayon plus large que prévu par les plans antérieurs à l’accident du 11 mars 2011, plans qui se sont avérés inopérants face à l’ampleur de la catastrophe. Reste que leur concrétisation s’avère complexe. En Europe, quand ils existent, les périmètres d’évacuation varient d’un à 20 km et ceux de distribution préventive d’iode de cinq à 50 km. Au Japon un village situé à cette distance de la centrale accidentée a été évacué.

En France, où tournent 58 réacteurs dans 19 centrales, les réacteurs du Bugey (Ain) se trouvent à 35 km de Lyon, ceux de Gravelines (Nord) à 25 km de Dunkerque comme de Calais.

A ce stade, l’Etat français refuse de dire s’il envisage de modifier ses PPI comme sont en train de le faire l’Allemagne et la Suisse. En attendant, les élus dénoncent les défaillances des dispositifs au sein même des périmètres actuels.

« En 12 ans, on a fait quatre exercices de crise. Le système d’alerte (sirène, haut parleur, appels téléphoniques) de la population s’est à chaque fois montré peu fiable. Lors du dernier exercice, en 2012, un Flamanvillais sur trois n’a pas reçu l’alerte ou alors avec retard », raconte Patrick Fauchon, maire PS de Flamanville (Manche), qui vient toutefois d’obtenir l’installation d’une seconde sirène pour laquelle il bataille depuis des années.

Alexis Calafat, dont la mairie est à 500 mètres de la centrale de Golfech (Tarn-et-Garonne) n’entend pas toujours la sirène non plus. Ce système est certes doublé partout d’un dispositif d’appels des téléphones fixes de la population sur 2 km, mais cette précaution est jugée insuffisante à l’ère du portable. Lors du dernier exercice autour de Gravelines en 2011, le système a permis de composer 6.000 numéros en 15 minutes mais 28,7% des appels ont sonné dans le vide. Et les abonnés sur liste rouge n’ont pas été contactés.

Golfech dispose à présent d’un système d’alerte de la population par téléphone portable que l’Etat envisage d’étendre au niveau national.

Les municipalités sont aussi censées passer en voiture dans les rues avec un haut parleur, mais ce dernier s’avère à peine audible, comme l’a constaté l’AFP. A l’heure du double vitrage, ce système paraît si inopérant que M. Calafat y a renoncé.

Les problèmes d’alerte « c’est vrai partout », assure le président de l’Anccli, Jean-Claude Delalonde.

Les centrales elles-mêmes sont-elles parées? Beaucoup en doutent depuis l’exercice de crise improvisé demandé par des parlementaires lors d’une visite surprise à Paluel (Seine-Maritime) en 2011. Documentation parfois erronée, clef du tableau électrique indisponible: Claude Birraux, alors président (UMP) de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), y a constaté « des situations parfois burlesques ».

La communication entre les autorités ne semble pas rodée non plus. Fin 2011, lors du dernier exercice autour de l’usine de retraitement d’Areva à Beaumont-Hague (Manche), qui concentre le plus de matière radioactive en Europe, la préfecture a mis 40 minutes pour parvenir à se connecter en audioconférence avec Areva et l’ASN. Les codes téléphoniques n’étaient pas les bons.

« Nombre d’exercices demandent à la population de rester chez elle et de laisser les enfants à l’école. Mais des alertes déclenchées par erreur ont montré que quand les gens pensent que c’est un véritable accident, ils se précipitent à l’école pour prendre leurs enfants et s’en aller », témoigne Alexis Calafat, qui préside l’association des maires de communes où se trouvent des sites nucléaires.

A Gravelines, en 2011, on a testé l’évacuation. Résultat: un « ballet incessant d’autobus qui se croisaient et se recroisaient au centre de Gravelines et créaient des bouchons inextricables, parce que les chauffeurs ne savaient pas où ils devaient se rendre », selon un rapport de la CLI.

A Golfech, les exercices de crise ne sont plus pratiqués que tous les cinq ans au lieu de trois ans, pour des raisons budgétaires, déplore M. Calafat.

Et dans la très nucléaire Normandie, où l’usine de la Hague est restée coupée du monde pendant deux jours en 2013 à cause de la neige avant que l’armée ne dégage la route, les élus s’interrogent sur l’accessibilité des sites.

La France a toutefois progressé depuis 20 ans, nuancent des élus.

En témoigne la création après Fukushima des Forces d’action rapide nucléaire (Farn), composées de 230 « pompiers du nucléaire ». Ce dispositif unique au monde, salué par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), est réparti sur quatre sites: Paluel, le Bugey, Civaux (Vienne) et Dampierre (Loiret).

Depuis 2011, tous les départements doivent avoir leur stock d’iode à distribuer sur tout leur territoire. Dans le Haut-Rhin, par exemple, les lieux de stockage sont multiples. En Moselle, les comprimés sont regroupés à moins de 15 minutes de la centrale de Cattenom. Dans la Manche, en revanche, ils sont près de Saint-Lô, à une heure et demie de route de Flamanville.

En cas d’accident, une fois les comprimés acheminés dans le canton concerné, il revient aux maires d’avoir une liste de volontaires pour les distribuer. « Les maires en sont pénalement responsables. Ils peuvent se retrouver face à un tribunal comme celui de la Faute-sur-mer », affirme Yannick Rousselet de Greenpeace France. L’ancien maire de cette commune vendéenne a été condamné en décembre à quatre ans de prison ferme pour la mort de 29 personnes lors du passage de la tempête Xynthia en 2010.

Quant à l’Assemblée nationale, elle devrait voter jeudi, sur proposition de l’UMP, la création d’un délit pénal d’intrusion dans les centrales nucléaires, passible d’un an d’emprisonnement, pour s’opposer aux actions des militants antinucléaires.

© AFP

2 commentaires

Ecrire un commentaire

    • Soulier

    Ne prenons plus de risques il est temps de passer aux énergies libre . Elles sont au point et fonctionnent depuis des décennies !..Évitons la faillite de nos États, morale et financière. Protégeons nos libertés .
    « De toute façon , on n’arrête pas le système en voulant le détruire, on l’arrête en arrêtant de de le nourrir et en construisant sans lui ! » La folie , c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent . ( Albert Einstein )
    En regardant la situation du monde en général, je pense qu’il y a trois causes qui bloquent notre évolution . Nous avons les moyens et l énergie pour les renverser,
    Sans révolution, sans heurt, et sans injustice .
    La première :
    Se référer tout simplement au discours vrai et juste du 3éme Président des États Unis
    Thomas Jefferson en 1802.
    On ne fabrique pas de la richesse par de la SPECULATION, mais par le TRAVAIL .Je pense que les institutions bancaires sont plus DANGEREUSES pour nos libertés que des armées entières prêtes au combat.
    Si tous les peuples permettent un jour que des banques privées contrôlent la monnaie, toutes les institutions qui fleuriront autour de ces dites banques priveront les gens de toutes possessions, d ‘abord par l’inflation ensuite par la récession, jusqu’au jour ou leurs enfants se réveilleront sans maison et sans toit sur la terre que leurs parents ont conquise . A ce propos regardez : Le Président qui disait la vérité :….Et cerise sur le gâteau ,………………………………….. La loi Rothschild du 3 janvier 1973 « INTERDIT » ??? à la France de s’emprunter à elle-même à taux zéro et « OBLIGE ???? » à emprunter au Marché avec intérêts sans aucune raison ? Depuis toutes ces années, la dette à pris une telle ampleur que l intégralité des taxes et des impôts ne couvre même plus les intérêts. Les services publics sont donc entièrement financés par d autres emprunts à partir de rien, que nous REMBOURSERONT SANS FIN aux banques qui se frottent les mains …. ».( Si la population comprenait le système bancaire , je crois qu’il y aurait une révolution avant demain matin » signé: Henry Ford .. Industriel .. « Celui qui contrôle l’argent contrôle le monde » : La seconde :
    Sans vouloir mettre en avant l’écologie, car elle appartient à tout le monde, mais une simple logique de survie, il faut : Vite très vite développer et utiliser les énergies libres, ne plus dépendre des pays producteurs de pétrole, gaz, etc. C’est la ruine de nos états, »SOYONS INDEPENDANTS »
    Il suffirait tout simplement de faire un audit sur les dépenses énergétiques de tous les particuliers et de toutes nos entreprises ! Nous récupérerions des milliards d’Euros qui seraient réinvestis dans la consommation !
    Ces énergies existent et sont disponibles pour tous, les brevets sont tout simplement bloqués . De quel droit nous les interdire ? Le résultat serait immédiat. L’industrie dans sa globalité redémarrerait et des milliers d’emplois seraient crées, la consommation redémarrerait et les coûts de production baisseraient. La plus grosse facture est L’ENERGIE !

    C’est comme si, à une époque nous avions refusé l’électricité et insisté à améliorer la bougie ???
    Imaginez le retard et les conséquences dramatiques dans lesquelles nous serions .
    Enlevons toutes peurs crées par certains et sortons du moyen-âge .Pour le coté obscur , savoir reconnaître que l’argent du pétrole et du gaz sers à financer le terrorisme mondial ! C EST UN CRIME CONTRE L HUMANITÉ D UTILISER DES CARBURANTS FOSSILE A NOTRE ÉPOQUE !GAZ DE SCHISTE COMPRIS ! ARRÊTONS DE TOURNER AUTOUR DU POT « Celui qui contrôle l’énergie peut contrôler les continents ».Que soit reconnus les crimes contre l’environnement comme des crimes contre l’humanité .

    • chapolin

    Ces mesures de sécurité en cas d’accidents ou d’attentats, de contaminations, sont lamentables, c’est un véritable « foutage de gueule ». Les dangers potentiels sont horribles, dignes de l’holocauste et les souffrances qu’ils peuvent provoquer incalculables.