Paris (AFP) – Après l’échec du plan Ecophyto, le ministre de l’agriculture présente une nouvelle méthode reposant sur la recherche et l’innovation et repousse l’objectif d’une réduction de 50% des pesticides de 2018 à 2025.
« On va fixer l’objectif d’une baisse de 50% en 2025, avec un palier intermédiaire de 25% en 2020 », annonce Stéphane Le Foll dans un entretien à Libération publié vendredi.
A l’issue du Grenelle de l’environnement en 2008, la précédente majorité avait lancé son plan Ecophyto dont l’ambition était de réduire « si possible » de 50% l’usage des pesticides d’ici à 2018.
Mais ce plan est loin d’y être parvenu puisque l’utilisation de produits chimiques en agriculture a au contraire progressé de 5% entre 2009 et 2013.
Cette fois, le gouvernement entend appliquer une autre méthode. Stéphane Le Foll, chantre de l’agroécologie, veut vulgariser de nouveaux modèles de production plus économes en intrants, comme la rotation des cultures qui permet de lutter contre l’érosion des sols et les maladies.
Il souhaite également développer les alternatives naturelles aux pesticides, le « biocontrôle ». Ce peut être un insecte (le trichogramme par exemple) qui piège un insecte ravageur (comme la pyrale du maïs), ou d’utiliser une algue (telle que la laminarine) pour stimuler les défenses des pommiers et ainsi leur permettre de résister à la tavelure,
Autre levier d’action: l’innovation autour des machines agricoles avec l’utilisation de services cartographiques, ou de pulvérisateurs de précision pour optimiser l’utilisation de pesticides.
Le ministre compte également s’appuyer sur les fermes pionnières du réseau Dephy. D’environ 2.000 aujourd’hui, « on va porter le nombre de ces fermes à 3?.000. Chacune entraînant dix exploitations autour d’elle, on parie sur l’effet tâche d’huile », explique Stéphane Le Foll.
Ces fermes ont en effet des résultats concluants puisqu’elle ont « vu l’utilisation des pesticides baisser en moyenne de 12% en 2013 », une performance notable quand on sait qu’en moyenne l’usage des pesticides a au contraire bondit de 9% sur l’année.
Par ailleurs, il ouvre la voie à un système de pénalités financières, dans un premier temps et de façon expérimentale à l’intention des distributeur.
« Au lieu de vendre un produit, ceux-ci seront incités à vendre plus de services, c’est-à-dire apprendre aux agriculteurs à utiliser la juste quantité ou des techniques alternatives ».
Et s’ils ne parviennent pas à « baisser de 20% le nombre de doses utilisées sur cinq ans », ils seront soumis à des pénalités financières sur leurs marges.
Un plan mal reçu par les industriels de l’agrochimie qui rejettent tout objectif de réduction chiffré. « Cet objectif de réduction chiffré, il pose question. L’objectif pour nous est de réduire les impacts (sur l’eau, sur la santé…), pas les quantités », a réagi auprès de l’AFP Eugénia Pommaret, directrice générale de l’Union des industries de la protection des plantes (UIPP).
« Avec ces premières mesures (que de nombreux agriculteurs ont déjà prises depuis 10 ans ….) qui misent sur du matériel plus performant, plus précis, la réduction se fera à la marge, de quelques pourcentages, mais au final cela maintien l’agriculteur dans un système dépendant aux pesticides », regrette de son côté l’ONG Générations futures qui milite contre les pesticides.
Et pour François Veillerette, son porte-parole, « il n’est pas question que dans 10 ans on refasse le constat de l’échec et qu’on reparte à zéro avec un nouveau plan qui reculerait encore l’objectif de réduction ».
« Le système actuel est à bout de souffle, tous les signaux sont au rouge (pollution des eaux, de l’air, perte en biodiversité, impacts sanitaires avérés….) », interpelle-t-il.
La Confédération paysanne, syndicat agricole minoritaire et proche des milieux écologistes, salue elle « l’intention » mais regrette le manque de « cohérence ».
« L’ambition agro-écologie ne peut voisiner avec des politiques publiques qui favorisent la +compétitivité+, l’industrialisation, l’exclusion des fermes petites ou diversifiées, en phase avec une démarche agro-écologique », estime-t-elle.
© AFP
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