Lisle-sur-Tarn (France) (AFP) – « On ne les laissera pas passer »: malgré le froid et l’humidité, une centaine de zadistes continuent à vivre sur le chantier du barrage de Sivens (Tarn), endeuillé par la mort de Rémi Fraisse, et restent déterminés plus d’un an après le début de l’occupation.
L’herbe givrée par le frimas craque sous les godillots crottés. En cette matinée de janvier, il fait près de zéro dans la vallée de Sivens. Le soleil voilé n’arrive pas à percer la brume ni à réchauffer les tentes blanchies par la gelée.
A la recherche de chaleur, les zadistes se sont regroupés dans « La Métairie Neuve », corps de ferme qui sert dorénavant de QG aux occupants.
Devant une vieille cheminée, une dizaine d’entre eux grelottent face à deux maigres bûches qui offrent un faible réconfort aux mains glacées que l’on frotte au-dessus du foyer.
« Touche comme elles sont froides », lance une occupante pour prouver que « la vie ici, c’est dur ».
Le chantier de la retenue d’eau est occupé depuis octobre 2013. La mort de Rémi Fraisse lors d’affrontements avec les gendarmes sur le site le 26 octobre 2014 avait poussé à 200 environ le nombre des zadistes. Avant de retomber à l’hiver, mais pas totalement.
« On est une grosse cinquantaine maintenant », assure Éric, dit « Petof », zadiste de 61 ans. Une visite de la « zone à défendre » (zad) confirme le nombre: une trentaine de tentes ou de vieux Combis Volkswagen pataugent dans l’épaisse gadoue qu’ont laissée les trombes d’eau de l’automne.
Deux dortoirs de plus de dix places chacun ont été installés, dont un dans la Métairie. « Il n’y a pas de chauffage », confesse Pétof. « Ça descend un peu mais il ne gèle jamais ».
Cinq cabanes ont de plus été construites, dont la « maison » d’Isa, aménagée dans le creux d’un arbre.
En haut d’une échelle périlleuse, des branchages tiennent des planches de bois où des couvertures ont été tendues pour tenter de stopper le froid. Derrière la « porte » faite de bâches de plastique, un ballot de paille attend d’être déchiqueté. La brune pétillante explique que « c’est pour boucher les trous » des parois où s’infiltre un vent glacial.
Isa vit ici après avoir laissé son garçon de 10 ans à son père. « On fait des sacrifices. Manifester ne suffit pas. Il faut être sur le terrain. On ne les laissera pas passer », explique l’ex- militante du Parti de gauche.
Pour faire mentir les Cassandre qui prédisaient la fin de l’occupation avec l’hiver, les zadistes ont dû s’organiser.
A la Métairie, une pièce abrite les dons : des sacs de pommes de terre ou de pâtes et des dizaines de courges qui semblent alignées comme dans un concours du plus beau légume.
Non loin de là, un four à pain crache son épaisse fumée.
![]() Le campement des militants « zadistes » près du chantier du polémique barrage de Sivens, le 6 janvier 2015 © AFP Pascal Pavani |
Quelques WC secs ont été installés – une cuvette de bois posée sur un seau – ainsi que des douches solaires. « Mais il faut qu’il y ait du soleil pour avoir de l’eau chaude », confesse un zadiste visiblement en manque d’ablutions.
L’eau potable sort d’une source où un panneau avertit: « ni pipi ni caca. Pollution ». Un cinéma de fortune a même été installé dans un chapiteau prêté par le Parti Communiste.
Ironie du sort, la zone de stockage des engins de chantier créée par l’entreprise de défrichement a été « reprise » par les zadistes, qui y ont construit un dortoir. Le vieux groupe électrogène, brûlé lors des heurts qui ont coûté la vie à Rémi Fraisse, est toujours là, comme le trophée d’une bataille gagnée.
Une parcelle de blé et un potager ont été plantés. « Des fèves, des pois, des oignons », explique Hélios, 25 ans. L’ancien étudiant en agronomie dort depuis deux mois dans « une tente Quechua à 30 euros ». « J’ai mis un pull pour dormir cette nuit ».
Le froid n’émousse cependant pas la détermination. « Je vais rester au moins jusqu’à la récolte de blé, en juillet », affirme Hélios. « A moins qu’on nous expulse avant. Mais s’ils le font, nous serons 10.000 à venir ».
© AFP
3 commentaires
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rapasava
Voila des hommes valeureux !!!
Oskar Lafontaine
C’est paradoxal, mais c’est ainsi, et ce sont des militants classés à gauche et même très à gauche, qui contribuent à éviter une aggravation du désastre des finances françaises par des « investissements » contre-productifs comme ce barrage de Sievens à l’absurdité économique flagrante et même largement démontrée.
Les espagnols se sont construits, à coups de milliards d’euros avant le début de la crise, des aéroports inutiles et des hôtels qui demeurent sans clients, entre autres « investissements » absurdes, et depuis, seuls les crédits restent à rembourser aux banques, alors qu’il n’y a et n’y aura aucune rentrée d’argent.
Cet exemple devrait donner à réfléchir. Le bon sens, vient parfois de là où on l’attendait le moins, il
Sievens, Roybon, ce sont là des dépenses du même tonneau et qu’il faut empêcher coûte que coûte.
Oskar Lafontaine
C’est paradoxal, mais c’est ainsi, et ce sont des militants classés à gauche et même très à gauche, qui contribuent à éviter une aggravation du désastre des finances françaises par des « investissements » contre-productifs comme ce barrage de Sievens à l’absurdité économique flagrante et même largement démontrée.
Les espagnols se sont construits, à coups de milliards d’euros avant le début de la crise, des aéroports inutiles et des hôtels qui demeurent sans clients, entre autres « investissements » absurdes, et depuis, seuls les crédits restent à rembourser aux banques, alors qu’il n’y a et n’y aura aucune rentrée d’argent.
Cet exemple devrait donner à réfléchir. Le bon sens, vient parfois de là où on l’attendait le moins, puisqu’il est venu au cas particulier des « zadistes »
Sievens, Roybon, ce sont là des dépenses du même tonneau percé que ceux des espagnols et dépenses qu’il faut empêcher coûte que coûte.