Rennes (AFP) – Manuel Valls a relancé mercredi la polémique autour de Notre-Dame-des-Landes en suggérant d’engager la construction du futur aéroport nantais après la mi-2015, à la grande surprise de sa propre ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal.
Dans un entretien à paraître jeudi dans Ouest-France, M. Valls, répète la position du gouvernement, à savoir que les travaux sont suspendus à la fin des recours juridiques déposés par les opposants au projet. Mais il ajoute une précision: « Ce sera le cas au premier semestre 2015. Après la décision du tribunal administratif, il faudra alors s’engager dans la construction de Notre-Dame-des-Landes », le site choisi pour l’aéroport au nord de Nantes.
La date avancée par M. Valls a semble-t-il surpris Ségolène Royal, qui, invitée en direct sur France 5, a confié qu’elle n’était pas au courant de cette déclaration.
« Bon courage », a lancé la ministre, visiblement embarrassée, avant d’expliquer que « le Premier ministre a le droit de prendre des décisions, je n’ai pas à les commenter ». « Je lui laisse l’entière responsabilité de sa déclaration », a-t-elle dit.
Peu après son arrivée au gouvernement, Mme Royal avait plaidé en avril pour une « remise à plat » du projet et promis d’attendre la fin de tous les recours juridiques avant une éventuelle construction de l’aéroport, censé remplacer l’actuelle aérogare de Nantes Atlantique, au sud de l’agglomération.
Interrogée sur la prise de position du Premier ministre, Françoise Verchère, une élue locale opposée au projet d’aéroport, s’est dite « atterrée », estimant que les recours déposés devant la justice se prolongeraient bien au-delà du premier semestre de l’an prochain, compte tenu des appels prévisibles.
Soupçonnant Manuel Valls de déjà connaître le résultat des recours, à savoir un rejet par le Conseil d’Etat, Mme Verchère, a averti que « ce sera la guerre » dans le bocage nantais si le gouvernement tente de relancer les travaux avant la fin de tous les recours.
« On voit bien que certains veulent provoquer l’irréversible comme à Sivens », a-t-elle déclaré à l’AFP, en référence au projet de barrage du Tarn où un jeune opposant a trouvé la mort en octobre lors d’affrontements avec les gendarmes.
« Manuel Valls est dans son rôle de gorille qui tambourine sur sa poitrine en disant ‘je vais y aller' », a ajouté Mme Verchère, conseillère départementale (Parti de gauche) de Loire-Atlantique et membre du Cedpa (collectif des élus qui doutent de la pertinence de l’aéroport).
De violents affrontements avaient mis aux prises les forces de l’ordre et les opposants à l’aéroport fin 2012 lors d’une tentative d’évacuation de ces derniers du site prévu pour l’infrastructure. Le Premier ministre d’alors, Jean-Marc Ayrault, avait ensuite annoncé un moratoire des travaux.
Interrogé par le quotidien nantais Presse-Océan, M. Ayrault, fervent partisan du projet en tant qu’ancien maire de Nantes, a estimé que les propos de son successeur allaient « dans le bon sens ».
Dans Ouest-France, Manuel Valls, attendu jeudi et vendredi pour une visite en Bretagne, juge le projet « nécessaire pour le développement de Nantes et de son agglomération, et plus globalement, celui de l’ouest de la France ».
Relevant que « ce projet est soutenu par les collectivités territoriales et par les acteurs économiques », M. Valls réfute l’idée que le projet puisse être sacrifié afin de complaire aux écologistes.
Lundi, la fédération EELV de Loire-Atlantique a refusé de s’allier avec le PS pour les prochaines élections départementales de mars 2015, notamment en raison de leurs divergences sur le dossier du fameux aéroport.
Huit recours, non suspensifs, visant à obliger l’Etat et les collectivités à réclamer le remboursement de près de 38 millions d’euros d’aides versées au concessionnaire du futur aéroport, AGO (Aéroports du Grand ouest, filiale du groupe Vinci), ont été déposés fin octobre. Ils s’ajoutent à une trentaine de contentieux encore en cours de traitement, selon les opposants.
Fin novembre, le Conseil d’Etat a rejeté les pourvois formés par des riverains opposés au projet d’aéroport pour obtenir l’annulation de leur expropriation.
© AFP
3 commentaires
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Oskar Lafontaine
Il y a bien longtemps que j’ai le plus grand mépris concevable pour la prétendue « justice » française. Rien de ce qu’elle a déjà pu décider en matière au moins d’aménagement du territoire, sinon même dans tous les domaines, n’impose le respect, tant ses décisions sont manifestement prises « sous influence ». Soutien inconditionnel au nucléaire, aux bétonneurs, aux pollueurs aux lignes électriques et j’en passe, témoigne amplement de l’astronomique incompétence, nullité et ignorance encyclopédique de tout notre système judiciaire, ordinaire ou surtout administratif de toute question technique, scientifique, technologique. Si la « justice » avait fait correctement son travail, jamais, par exemple, Superphénix, cette incommensurable absurdité, qui en plus n’a jamais pu fonctionner à plus de 10 % de sa puissance théorique, lors des essais, n’aurait pu voir le jour.
Ce projet d’aéroport ne correspond à aucun besoin réel, mais empeste déjà les dessous de table, l’exemple de l’aéroport de Genève, avec un trafic plus important que celui de Nantes et une seule piste aussi, démontre qu’il n’y a nul besoin de massacrer davantage le bocage, d’autant que l’avenir incertain et les bouleversements attendus aux plans économiques, technolgiques et d’organisation des sociétés, ont déjà impacté notre mode de vie et l’impacteront un peu plus chaque année, dans une direction très contraire à la « bougeotte » actuelle qui, finalement, ne sert à rien. Pascal l’avait déjà bien compris qui écrivit : « le malheur de l’homme vient de ce qu’il ne sait pas rester au repos dans une chambre ». Et La Fontaine, fin observateur, nous conta lui l’histoire de l’homme qui court après la fortune et de celui qui l’attend dans son lit.
Les temps changent, les avions aussi changeront, et bien plus vite que certains, trop nombreux encore l’imaginent, rendant obsolète notre modèle actuel avec aéroports et longues pistes.
Bétonnage et goudronnage sont devenu, les deux calamités principales de la France.
Damien
J’approuve le commentaire d’Oskar Lafontaine. « Ce projet d’aéroport ne correspond à aucun besoin réel, mais empeste déjà les dessous de table, l’exemple de l’aéroport de Genève, avec un trafic plus important que celui de Nantes et une seule piste aussi, démontre qu’il n’y a nul besoin de massacrer davantage le bocage, » Non seulement cela, mais il existe plusieurs aéroports super-équipés,, totalement vide de toutes activités. Bien sur qu’il s’agit d’une affaire de pots-de vin et autres dessous de tables juteux. Car l’Europe a déjà financé des aéroports inutilisés pour 38 millions d’euros. La Cour des Comptes à relevé un gâchis de plus de 600 millions d’€ en divers projets, tous plus présentés comme porteurs d’avenir et finalement avérés peu rentables, inopportuns ou plus coûteux que prévus. De la tromperies et des « menteries » tout au long de ces projets plus politique que réellement économique. Citoyens il est temps de réagir!
Moinard
Et après il vendront cet aéroport aux chinois ?
comme celui de Bordeaux.
Le vrai but de l’opération reste mystérieux !