Paris (AFP) – L’orpaillage illégal en Guyane, avec son cortège de pollution, déforestation, insécurité, a connu une recrudescence inquiétante en 2013 provoquant une mobilisation inédite de la société civile locale à l’occasion de la venue de François Hollande.
Le chef de l’Etat, à peine arrivé dans le département le plus vaste de France en provenance du Brésil voisin, sera interpellé par un collectif d’une quarantaine d’organisations politiques (Guyane 73 et Walawari), économiques (opérateurs miniers, Medef) et de défense de l’environnement (Guyane Nature Environnement, WWF), plus enclins en temps normal à s’affronter qu’à se coaliser.
Ils se sont baptisés « les Hurleurs », comme les singes, parce que dans la forêt amazonienne, « ce sont les animaux qui crient le plus fort », a expliqué à l’AFP Marc Barrat, un des porte-parole.
Ils appellent les Guyanais à se rassembler à 18H00 (22H00 à Paris) place des Palmistes, au coeur de Cayenne, pour « dire haut et fort (leur) ras-le-bol de l’orpaillage illégal ».
Car si l’orpaillage légal, très encadré par la législation française, permet d’extraire entre 1 et 2 tonnes de minerai par an, les garimperos clandestins en sortent près de 10 tonnes par an, dont « la quasi-totalité est exfiltrée vers les pays frontaliers, Brésil et Suriname », explique le collectif.
« Cet or est donc un or fantôme pour la Guyane qui n’en gardera aucune trace si ce n’est les impacts désastreux de son extraction », déplorent les membres du collectif.
Les conséquences néfastes sont légion: pollution au mercure des rivières, contamination des populations amérindiennes, recrudescence du paludisme, prostitution, exploitation humaine, règlements de compte à l’arme lourde, déforestation…
Après une enquête de WWF publiée dans la presse locale il y a quelques mois, organisations et citoyens ont commencé à se mobiliser et à réclamer la transparence.
La préfecture a fini par publier la semaine dernière des données alarmantes. Les chantiers illégaux repérés en 2013 sont au nombre de 771 contre 392 en 2011, dépassant ainsi le pic de 612 chantiers en 2009, alors que l’opération Harpie de lutte contre l’orpaillage clandestin démarrait tout juste. Et les surfaces déforestées ont de nouveau bondi après avoir été limitées grâce à Harpie.
« Illusoire de contenir l’afflux massif d’orpailleurs »
Les limites du plan Harpie sont aussi soulignées dans une note du patron de la gendarmerie en Guyane, le général Lambert Lucas, dont l’AFP a eu copie vendredi et qui a été révélée par le site d’information locale Guyaweb.
« Il est désormais illusoire de prétendre que l’opération Harpie, dont les succès initiaux furent réels, puisse aujourd’hui s’opposer ou même contenir l’afflux massif d’orpailleurs illégaux sur le sol guyanais », écrit le général Lucas.
Il y avance le chiffre d’au moins 10.000 chercheurs d’or illégaux présents en forêt, et insiste sur le caractère « fortement structuré » des filières clandestines brésiliennes, faisant preuve de « mobilité et d’ingéniosité ».
Harpie, qui mobilise plusieurs centaines d’hommes dans la jungle, parfois au risque de leur vie (deux militaires ont été tués dans une embuscade à Dorlin en juillet 2012), souffre aussi d’un matériel défaillant et d’un redéploiement d’effectifs vers les villes du littoral pour lutter contre l’insécurité classique.
Mais pour contrôler un territoire aussi vaste, véritable travail de Sisyphe, la France ne peut y parvenir sans l’aide de ses deux voisins.
Un accord de coopération avec le Suriname est toujours en souffrance.
En revanche, celui signé avec le Brésil fin 2008, ratifié par la France en juillet 2011, vient tout juste de l’être par le puissant voisin avec qui la France partage sa plus grande frontière, qui est aussi un axe logistique majeur de l’orpaillage illégal.
WWF Guyane s’est réjoui de cette nouvelle, rappelant que le débat côté brésilien avait duré plus de trois ans « émaillés de nombreux blocages émanant du rapporteur du texte, élu de l’Amapa », l’Etat brésilien frontalier.
En effet, « vu l’importance économique au Brésil » des retombées de l’orpaillage clandestin qui fait vivre des villes frontalières sur le fleuve Oyapock, « la Guyane a été un peu sacrifiée sur l’autel de la balance commerciale extérieure de la France », a regretté Marc Barrat.
© AFP
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Hurleurs de Guyane
Les Hurleurs de Guyane, un mouvement pacifique et citoyen qui a prouvé vendredi 13 décembre que la mobilisation contre ce fléau existait et ne s’arrêterait pas !
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