Malgré Fukushima, l’Asie est la locomotive mondiale du nucléaire


La centrale nucléaire de Qinshan, dans la province chinoise du Zhejiang, le 2 juin 2010 © AFP/Archives

Daegu (Corée du Sud) (AFP) – Malgré la catastrophe de Fukushima, l’Asie est la locomotive du développement de l’énergie nucléaire dans le monde, Chine et Inde bâtissant des dizaines de réacteurs pour couvrir leurs besoins d’énergie exponentiels, tandis que le gouvernement japonais veut renouer avec l’atome.

« L’Asie sera au centre de l’expansion du nucléaire », a déclaré à l’AFP Yukiya Amano, directeur général de l’Agence internationale pour l’énergie atomique, chargée de promouvoir le nucléaire civil.

« Le nucléaire va se développer dans le monde, mais l’Asie sera au coeur de ce mouvement, la Chine, l’Inde et la Corée du Sud faisant partie des pays qui vont en faire un usage accru », a-t-il assuré en marge du Congrès mondial de l’énergie, organisé jusqu’à jeudi à Daegu (Corée du Sud).

En effet, si la catastrophe de Tchernobyl en 1986 avait donné un coup de frein majeur au secteur, ce phénomène ne s’est pas vraiment reproduit après le tremblement de terre et le tsunami de mars 2011 au Japon, qui ont dévasté la centrale nucléaire de Fukushima.

« En fait, la construction de nouveaux réacteurs a continué. On en compte en ce moment environ 70 en construction dans le monde, en plus des 430 déjà en exploitation. Et l’essentiel de cette croissance se déroule en Asie », a rappelé M. Amano lors du Congrès.

La Chine mène cette dynamique. Ses dirigeants voient dans l’atome un élement incontournable -et faiblement émetteur de C02- de leur politique énergétique, tant les besoins du pays sont immenses.

« La Chine abrite 1,3 milliard d’habitants et chaque année la consommation d’énergie augmente de plus de 5%, ce qui est indispensable pour alimenter une croissance économique de 10% », a rappelé mercredi Yumin Wang, haut cadre de l’administration énergétique chinoise.

Dans ce contexte, « bien qu’il y ait eu une crise nucléaire au Japon, l’énergie nucléaire fait toujours partie des solutions pour la Chine », abonde Liu Zhenya, PDG de la State Grid Corporation, plus grand gestionnaire de réseau électrique chinois.

D’après l’Assocation mondiale du nucléaire (WNA), la Chine mène le programme nucléaire le plus impressionnant du monde, avec 30 réacteurs en chantier (dont deux EPR, construits avec EDF et Areva), et 59 autres en vue, qui s’ajouteront aux 17 existants.

« La Chine, plus que tout autre pays, doit investir dans toutes les sources d’énergie. Elle n’a pas le choix à court terme » si elle veut remplir ses objectifs de développement ambitieux, résume Karl Rose, en charge des scénarios énergétiques au Conseil mondial de l’énergie.

Des responsables du secteur énergétique japonais, dont le vice-président de Tepco, exploitant de la centrale accidentée de Fukushima, ont quant à eux martelé à Daegu que l’atome continuerait à jouer un rôle dans l’archipel nippon.

La pression est forte sur le plan économique, le Japon étant pour l’instant contraint d’importer du pétrole et du gaz à grands frais pour compenser l’arrêt de son parc nucléaire, ce qui mine sa balance commerciale et sa compétitivité industrielle.

Et le gouvernement Abe souhaite lui-même relancer les réacteurs, malgré la vive opposition des écologistes et d’une partie de la population.

L’Inde, où des millions d’habitants n’ont qu’un accès intermittent à l’électricité, construit quant à elle sept réacteurs (pour un parc actuel qui en comprend 20) et en a 18 autres en projet, selon la WNA, ce qui en fait l’autre locomotive du secteur après la Chine.

Le Pakistan veut passer de trois à cinq réacteurs, tandis que le Vietnam, qui n’en possède encore aucun, veut en construire quatre.

Enfin, la Corée du Sud, déjà un bastion mondial du nucléaire, veut encore étendre sa part dans le bouquet électrique de 40% à 60% d’ici à 2035, et cinq nouveaux réacteurs sont déjà en construction.

Mais cette politique suscite des inquiétudes, alors que la catastrophe subie par le voisin japonais a jeté une lumière crue sur les risques d’une dépendance trop forte à l’égard de l’atome.

Le gouvernement doit réviser en décembre cette politique et un groupe d’experts vient de faire sensation en lui recommandant de réduire l’atome à 25% du bouquet électrique d’ici 20 ans.

© AFP

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