Climat : pour la première fois, l’Etat mis en demeure de se justifier

thermomètre

Le Conseil d'Etat a donné jeudi trois mois à l'Etat pour démontrer qu'il prenait bien les mesures pour parvenir à ses engagements en matière de réduction des gaz à effet de serre. © AFP/Archives PHILIPPE HUGUEN

Paris (AFP) – La justice française a donné jeudi trois mois à l’Etat pour justifier ses actions en matière de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre, une décision « historique » pour les défenseurs de l’environnement.

La plus haute juridiction française avait été saisie en janvier 2019 par le maire écologiste de Grande-Synthe (Nord), Damien Carême (élu depuis député européen et qui a donc quitté son mandat), qui estimait que sa commune du littoral du Nord était menacée de submersion par « l’inaction climatique » du gouvernement.

Le Conseil n’a pas immédiatement tranché sur le fond de ce premier dossier contentieux lié au climat à arriver devant lui, mais a donné trois mois à l’Etat – qui avait argumenté par écrit pour un rejet pur et simple de la demande – pour rendre compte de ses actions en matière de lutte contre les émissions responsables du réchauffement climatique.

Les juges administratifs ont notamment relevé que l’Etat s’était engagé, pour mettre en oeuvre l’accord de Paris de 2015 visant à limiter le réchauffement, à atteindre une baisse de 40% des émissions en 2030 par rapport à leur niveau de 1990.

Budgets dépassés 

Or les « budgets carbone » d’émissions adoptés dans les différents plans de l’Etat -dont la dernière « stratégie nationale bas carbone » remonte au mois d’avril- ont toujours été dépassés, comme l’ont notamment montré les rapports annuels du Haut Conseil pour le Climat. Et l’Etat a d’ailleurs en conséquence revu ses objectifs à la baisse.

Constatant ce « report (…) d’une partie de l’effort de réduction des émissions devant être réalisé », les juges administratifs ont demandé au gouvernement de justifier de la « compatibilité avec la trajectoire de réduction des gaz à effet de serre » pour tenir son objectif de 2030.

Ils ont ainsi suivi les recommandations du rapporteur public, lors de l’audience du 9 novembre. Ce magistrat chargé de faire une recommandation sur le dossier avait alors souligné que « le cœur du sujet est le calendrier des actions », puisqu’il « y a bien urgence climatique aujourd’hui ».

Et il avait estimé que les engagements de la France, dans le cadre de l’accord de Paris, des législations européennes ou nationales ne pouvaient avoir « un objectif uniquement programmatique mais bien contraignant ».

« Renvoyer les requérants à 2030 ou 2050 pour voir si les objectifs sont atteints vous conduirait à participer à cette tragédie » climatique, car « le risque existe que tout retard soit irréversible », avait-il argumenté.

« Jolis engagements »

En le suivant, le Conseil d’Etat a pris « un arrêt qui me parait historique », a salué Corinne Lepage, avocate de la commune de Grande-Synthe. « Le Conseil d’Etat souligne que l’Etat a des obligations non pas de moyens mais de résultats. A deux reprises, il utilise le mot d’+effectivité+, ce qui veut bien dire que les politiques ne doivent pas être seulement de jolis engagements sur le papier », a-t-elle ajouté.

Une avancée également saluée par Hugues Hannotin, avocat du regroupement d’ONG « l’Affaire du siècle », qui ont elles aussi engagé une procédure contre l’Etat pour inaction climatique et s’était jointes comme « intervenants » à la procédure de la municipalité nordiste. « L’Etat va devoir rendre des comptes, les lois de programmation ne sont pas seulement pour la galerie. »

« Décision historique : l’Etat doit respecter ses engagements pour le climat (et) devra également justifier des moyens qu’il met en oeuvre pour atteindre ces objectifs », s’est félicité sur Twitter « l’Affaire du siècle », soutenue par une pétition de 2,3 millions de citoyens, alors que Greenpeace France a tweeté un grand « BOOM! ».

Le gouvernement n’a pas immédiatement réagi, mais à l’issue de l’audience du 9 novembre, le ministère de la Transition écologique avait indiqué à l’AFP qu’il serait en cas de décision lui demandant de se justifier de ses actions « entièrement à disposition ». « Nous avons des choses à défendre », notamment en matière d’actions de décarbonation, avait indiqué une source au cabinet de la ministre Barbara Pompili.

©AFP

Pour en lire davantage sur « L’affaire du siècle » :

14 commentaires

Ecrire un commentaire

    • Rozé

    L’engagement climatique de réduction de nos pollutions dont émission de GES me semble en contradiction totale avec le développement de la 5G vu le caractère énergivore indéniable de celle-ci et des applications envisagées grâce à cette technologie.

    • Yves Lanceau

    Pourvu que les arcanes judiciaires ne déploient pas des arguments bidons mais parfaits juridiquement, afin de se sortir de ce piège !

    • Grossmann

    À l’évidence, cette prise de conscience de la France qu’il va falloir que nous agissions sans tarder est une bonne chose.

    La 5G n’est pas le plus urgent

    Jacques Attali avait raison de dire que la seule chose vraiment rare est « le temps qui passe ». Voir le point 5 de mon rapport pour l’IESF
    https://www.dropbox.com/s/gzta2y6902biu10/5urgence-changement.pdf?dl=0

    L’exécutif français représenté par notre Président a tout intérêt à ce sujet de tenir compte de la remarque du secrétaire général de l’OCDE qui estimait : « il vaut mieux faire partie de ceux qui établissent les règles plutôt que de se compter au nombre de ceux qui font le choix de les adopter ». D’ailleurs la France, avec la COP21 et les accords de Paris sur le climat ne s’est-elle pas positionnée temporairement en tant que leader ? Il lui appartient maintenant de le rester et de faire corps avec l’Allemagne pour tenter d’unifier avec la Pologne les points de vue de tous les pays européens. Une fois cette coordination européenne achevée en ce qui concerne la nature de nos nouvelles chaînes énergétiques. Voir le point 6 de mon rapport à l’IESF https://www.dropbox.com/s/xey8jc5eaeloo80/6finance-acteurs.pdf?dl=0

    les secrétaires généraux de l’OCDE et de l’ONU auraient ensuite plus de facilité sur le plan mondial pour convaincre la Chine et les Indes, gros consommateurs de produits fossiles, que leur intérêt est de prendre exemple sur les solutions européennes.
    Concernant le réchauffement climatique le « tout petit lutin thermique que je suis » estime que notre seule chance de sortir du tunnel est que des pays comme la Chine et les Indes RÉELLEMENT adhère au changement de chaines énergétique qu’il propose. D’une nature optimiste il pense que nos amis anglais vont petit à petit réaliser qu’ils ont choisi la mauvaise voie avec le nucléaire et il est convaincu que les choses vont reprendre leur cours normal avec la nouvelle présidence américaine.

    • Jean Grossmann

    A l’évidence, cette prise de conscience de la France qu’il va falloir que nous agissions sans tarder est une bonne chose.
    Jacques Attali avait raison de dire que la seule chose vraiment rare est « le temps qui passe ». Voir le point 5 de mon rapport pour l’IESF
    https://www.dropbox.com/s/gzta2y6902biu10/5urgence-changement.pdf?dl=0

    L’exécutif français représentépar notre Président a tout intérêt à ce sujet de tenir compte de la remarque du secrétaire général de l’OCDE qui estimait : « il vaut mieux faire partie de ceux qui établissent les règles plutot que de se compter au nombre de ceux qui font le choix de les adopter ». D’ailleurs la France, avec la COP21 et les accords de Paris sur le climat ne s’est-elle pas positionnée temporairement en tant que leader ? Il lui appartient maintenant de le rester et de faire corps avec l’Allemagne pour tenter d’unifier avec la Pologne les points de vue de tous les pays européens. Une fois cette coordination européenne achevée en ce qui concerne la nature de nos nouvelles chaînes énergétiques. Voir le point 6 de mon rapport à l’IESF https://www.dropbox.com/s/xey8jc5eaeloo80/6finance-acteurs.pdf?dl=0
    les secrétaires généraux de l’OCDE et de l’ONU auraient ensuite plus de facilités sur le plan mondial pour convaincre la Chine et les Indes, gros consommateurs de produits fossiles, que leur intérêt est de prendre exemple sur les solutions européennes.
    Concernant le rréchauffement climatique le tout petit lutin thermique que je suis estime que notre seule chance de sortir du tunnel est que des pays comme la Chine et les Indes adhèrent RÉELLEMENT au changement de chaines énergétiques qu’il propose ci-dessus. D’une nature optimiste, il pense que nos amis anglais vont petit à petit réaliser qu’ils ont choisi la mauvaise voie avec le nucléaire et il est convaincu que les choses vont reprendre leur cours normal avec la nouvelle présidence américaine.

    • Michel CERF

    Je suis de l’avis de Rozé .

    • Guy J.J.P. Lafond

    À Rozé, Yves, Jean et Michel,
    Du côté de cet Atlantique, merci pour vos commentaires. Je ferai de mon mieux pour faire comprendre aux Américains et aux Canadiens que le moment est venu de vraiment retrousser nos chemises et de cesser de procrastiner.
    Je suis fort aise de constater que des juristes dans l’U.E. se secouent de plus en plus pour le climat. @:-)
    Après tout et comme disait l’autre, « les arbres, les forêts ont de la lenteur à partager avec nous. » Alors qu’est-ce qu’on attend pour enfourcher plus souvent nos vélos et pour aller admirer les parcs?
    Rappel:
    Parfois, je fonds sur ma chaise quand j’interagis sans succès avec des juristes à Ottawa en Ontario, soit dans la capitale fédérale du Canada. Ensuite, je me ressaisis en pensant à mon enfant, et aussi à l’Holocène qui nous a donné des milliers d’années de stabilité climatique.
    Mesure à surveiller:
    L’année où les glaciers dans les Alpes européennes, dans les Rocheuses canadiennes, dans l’Himalaya,…, recommenceront à se former, alors nous aurons mesuré un premier signe que l’espèce humaine est sur la bonne voie avec ses réductions d’émissions de GES.
    D’autres bons comportements à adopter:
    1 – Dans des hivers de plus en plus rudes, porter des vêtements qui nous gardent chauds et secs même quand on bouge beaucoup. La laine mérinos, ne pas oublier!
    https://www.ferme-mohair.com/A-31451-merinos-fibre-chaude-et-thermoregulante.aspx
    2 – En été, penser à faire un pèlerinage en altitude pour aller chercher un peu de fraicheur et pour aller flatter et remercier les moutons et la biodiversité sur Terre.
    Hier, le gouvernement actuel canadien s’est encore comporté en procrastinateur en retardant à 2030 la mesure de nos progrès dans notre combat contre le réchauffement planétaire accéléré de l’atmosphère terrestre.
    À nos vélos, tous!
    À suivre!
    @;-)
    t:@GuyLafond
    Un esprit sain dans un corps sain.

    • Claude Courty

    L’État, en tant que pouvoir dirigeant ce monde, ne peut qu’être accusé lui-même de complicité avec le pouvoir religieux ayant instauré et protégeant obstinément le dogme de la natalité auquel la planète et tout de ce qui la peuple doivent tous leurs malheurs.

    • Claude Courty

    Rien ne pourra être suffisant tant que règnera; aux dépens de notre environnement planétaire, le dogme de (sur)natalité humaine, auquel sont dus tous nos maux

    • Jean-Pierre Bardinet

    Bon, cette affaire est totalement absurde car elle ne se base que sur une opinion, et non sur les observations ni sur la raison. Or, les faits ont toujours raison sur les opinions. Les mesures d’évolution de niveau de l’Atlantique sur nos côtes montrent que la montée, mesurée depuis 1807 par le marégraphe de Brest, est très faible, sans accélération, de 1 mm/an :
    https://tidesandcurrents.noaa.gov/sltrends/sltrends_station.shtml?id=190-091
    Je présume que les prophéties cataclysmiques faites par M. Carême se réfèrent aux prévisions des modèles numériques intégrant les thèses non prouvées du GIEC. Or, comme ces prévisions sont fausses depuis 20 ans, avec des températures toujours plus fortes que celles mesurées par les observations, il n’y a aucune raison pour que les prophéties de submersions de M. Carême aient un zeste de crédibilité. Nous sommes dans un monde de fous où il suffit de crier le plus fort et de prédire d’horribles catastrophes, sans l’ombre d’une preuve, comme M. Carême ou l’affaire du siècle, pour que cela soit considéré comme une preuve et largement diffusé par nos médias serviles et incompétents.

    • Jean-Pierre Bardinet

    Il y a essentiellement 2 types de gaz émissifs majoritaires, qui peuvent absorber les IR émis par la surface : la vapeur d’eau et le gaz carbonique. Le taux de vapeur d’eau dans l’air est, selon les latitudes et les régions, de 1 à 5%. Celui du CO2 est de 0,04%. La vapeur d’eau est donc 25 à 125 fois plus présente que le CO2. Par ailleurs, le spectre d’absorption du CO2 est réduit à 2 fenêtres étroites, ce qui n’est pas le cas de la vapeur d’eau. Donc, ce serait un miracle physique si le CO2 minoritaire sur ces deux plans, avait un effet majoritaire sur la température. Enfin, cerise sur le gâteau, la part des émissions anthropiques mondiales n’est que de 4 à 6% environ, selon le rapport scientifique AR5 du GIEC, nos émissions françaises ne sont que de 0,9% de ce 4-6%. Même si, ce qui reste très hypothétique, le CO2 avait un effet mesurable sur la TMAG (température moyenne annuelle globale), nos émissions nationales de CO2 n’auraient aucun effet mesurable sur la TMAG (température moyenne annuelle globale et vouloir réduire nos émissions de 40% relève de la folie et non du bon sens le plus élémentaire.

    • Guy J.J.P. Lafond

    Bonjour à tous,
    J’ai lu avec intérêt les remarques de Jean-Pierre. Merci.
    Est-ce que Jean, qui une très bonne compréhension scientifique des phénomènes climatiques, va réagir aux observations faites par Jean-Pierre? En attendant que Jean le fasse, voici ma réaction:
    Ce qui me préoccupe le plus en ce moment et ce qui se mesure assurément bien est la diminution et aussi la contamination des nappes phréatiques en plusieurs endroits de la planète. Autrement, Jean-Pierre a parlé de l’augmentation du pourcentage de la vapeur d’eau dans l’air. Ma question est la suivante: « Avec le nouveau phénomène des « flash floods », le cycle de l’eau planétaire est-il devenu défectueux? La déforestation massive de notre planète peut-elle expliquer l’augmentation d’événements climatiques extrêmes partout sur le globe (e.g.: violent typhon et inondations majeures aux Philippines tout récemment). Les forêts, qui ont perdu en superficie, arrivent-elles encore à modeler le parcours de l’eau et à le ralentir? Aussi, des spécialistes de la climatologie nous disent que les grands glaciers fondent beaucoup plus rapidement et ne se reforment plus en très grande force comme avant l’époque industrielle? Si tel est le cas, où se retrouve toute cette eau potable? Sous forme de vapeur d’eau dans l’air des tropiques ou bien se perd-t-elle davantage dans les océans salés?
    Dans l’attente de vos réactions,

    • Patrice DESCLAUD

    A l’heure où on évoque enfin l’écocide, enfin un magistrat courageux. En droit c’est du pénal et se qualifie de carence fautive de l’état ! La France va-t-elle agir ou encore rester confinée dans l’inaction au delà du baratin de communication et promesses ? A suivre.

    • Michel CERF

    @ Guy Lafond : vous avez raison de réagir ainsi , depuis toujours J.P. Bardinet ne cesse de nier l’évidence , les faits sont là sous nos yeux et les théories de notre climatoseptique ne pèsent pas lourd face à la réalité , il a raison sur un point , nous sommes dans un monde de fous !….

    • Guy J.J.P. Lafond

    Merci Monsieur Cerf,
    En effet, nous serions tous devenus fous de consumérisme avec le temps. Et si tel est le cas, alors ayons une action concertée de consommateurs plus responsables et moins destructeurs de notre si douce planète bleue.
    1 – J’investis d’abord dans de bons vêtements de plein-air.
    2 – J’investis aussi dans ma santé en allant marcher au parc plus souvent et en laissant derrière moi beaucoup plus souvent un possible véhicule de 2 t, beaucoup trop lourd et beaucoup trop polluant. @;-)
    3- Si j’ai un chien, un chat, un cheval,.., ou bien un chameau, je l’emmène avec moi.
    Nous attendons d’autres réactions de nos cousins francophones.
    De l’Amérique du Nord, je vous vois bien. @:-)
    t: @GuyLafond